dimanche 20 novembre 2011

ZAT à Montpellier : inauguration de l'hôtel de ville

Le Monstre du Loch Lez, l'hôtel de ville à Montpellier et la Zone Artistique Temporaire aux bords du Lez

Hôtel de Ville à MontpellierC'est fois-ci, les Montpelliérains et leurs amis avaient droit à assister à une ZAT - Zone Artistique Temporaire - encore plus spéciale que ses deux prédécesseurs : elle ne consistait pas seulement dans de diverses performances artistiques comme toujours très originales, mais aussi dans l'inauguration du nouveau hôtel de ville. Et le comble : le jour de l'apparition du Monstre du Loch Lez, prédit par Nostradamus, l'illustre étudiant à la faculté de Montpellier, était venu.

Selon la prédiction, le Monstre du Loch Lez - dont personne ne sait si ses intentions envers les Montpelliérains sont pacifiques ou méchantes - aurait dû faire son apparition au moment qui réunissait onze fois le chiffre 1 : le 11 novembre 2011, à 11 heures, 11 minutes et 1 seconde.

Les Montpelliérains étaient au rendez-vous, le spectacle aussi. Le Monstre, par contre, hésite toujours... "Serait-il trop timide pour confronter la prédiction et les habitants de Montpellier ?", commente une dame interrogée par l'équipe de Montpellier Presse Online. "J'ai assisté à la plupart des spectacles", ajoute-t-elle avec humour, "Il y en avait qui étaient monstrueux. Mais je ne sais pas s'ils ont plu au Monstre de Loch Lez."


Zone Artistique Temporaire : Zat à MontpellierCe qui, par contre, a plu aux Montpelliérains était la cellule d'enquête instaurée par la mairie de Montpellier et l'intervention de divers spécialistes de monstruosité. Ainsi, Olaf Nitche, monstrologue de Düsseldorf en Allemagne, perché sur une île de livres, a expliqué au public ce qui distingue les monstres des êtres "normaux". Les différences, selon lui, ne sont pas énormes - il y a juste la question de la taille. Il faudrait s'imaginer l'effet d'une mouche haute de trente mètres... et déjà, on saurait ce qu'on ressent face à un monstre. Bref, un monstre est un être d'un aspect dont nous n'avons pas l'habitude...

Il y avait même un témoin qui a vu le monstre - ou presque. En effet, ce n'était pas Mehdi Demmoua, un étudiant de Saint-Clément-de-Rivière, qui a rencontré le Monstre du Loch Lez, mais son père. Saïd Demmoua, le père de Mehdi, a disparu en 1991 pour réapparaître 111 jours plus tard - et il a vu le Monstre. Personne ne l'a cru, sauf son fils... qui a saisi l'occasion de la ZAT pour raconter l'histoire de son père et, surtout, solliciter le Monstre de se montrer pour que les gens croient enfin le récit de celui qui a vu le Monstre de Montpellier.

L'équipe de Montpellier Presse Online a souhaité savoir ce qui était le plus important pour les Montpelliérains : cette troisième édition de la Zone Artistique Temporaire, l'apparition - ou non-apparition - du Monstre du Loch Lez ou l'inauguration de la nouvelle mairie.

"J'adore les ZATs", confie une dame d'une cinquantaine d'années à Montpellier Presse Online. "J'ai profité de toutes les ZATs, jusqu'à maintenant, j'y suis allé tous les jours. Et j'ai l'intention d'aller voir aussi les ZATs des dix ans prochains."

Une dame d'une trentaine d'années préfère le Monstre de Loch Lez. "Le monstre, bien sûr", assure-t-elle, "c'est lui qui m'intéresse. Il faut connaître les habitants de notre ville, même du souterrain, même s'ils ne se montrent pas tous les jours."

Un Monsieur un peu plus âgé qu'elle n'aime pas ce genre d'humour. "Tout ce spectacle pour attirer le regard des Montpelliérains sur la nouvelle mairie. Elle a déjà coûté une fortune au contribuable, est-ce vraiment nécessaire de faire toute cette mise en scène pour l'inauguration ?"

Montpellier : le monstre de loch lezUne étudiante récemment arrivée de la région parisienne est impressionnée. "J'imagine que, pour les Montpelliérains, c'est l'inauguration de l'hôtel de ville qui est le plus important. Je ne suis pas experte dans la matière, mais je crois qu'il est unique dans son genre, écologique est tout."

"Elle vous plaît ?" - L'étudiante sourit. "Franchement, non."

Que le goût est une chose qui se discute est aussi l'avis d'un Monsieur d'une soixantaine d'années. "Je sais qu'à Montpellier, on n'a pas le droit de le dire. Mais personnellement, la nouvelle mairie ne me plaît pas. On se sent perdu dans la halle d'entrée, elle semble froide. On se sent mal accueilli. Elle a l'air sombre, presque sinistre."

Une dame d'une trentaine d'années ne mâche pas ses mots : "Que les Montpelliérains ont-ils fait pour mériter une mairie aussi moche ?" et un jeune homme, plus prudent dans le choix de ses mots, déclare : "Le concept du bâtiment est très méritoire et servira d'exemple pour d'autres villes. Montpellier sera encore cité comme ville écologique. Mais l'aspect ne satisfera pas tout le monde."

Toutefois, il y a certains points où toutes les personnes interrogées était d'accord : "À Montpellier, il se passe toujours quelque chose. On ne s'y ennuie jamais." Et : "On ne peut pas dire qu'on vit dans une ville inconnue. Tout le monde a déjà entendu parlé de Montpellier. C'est sans doute une ville de superlatives." Et finalement : "La troisième ZAT était fabuleuse. Si, maintenant, la nouvelle mairie est aussi fabuleuse, on verra..."
Photos et texte : copyright Doris Kneller

lundi 7 novembre 2011

Montpellier et le bruit : travaux, bars nocturnes, voisins et télés...

Le bruit en ville - Montpellier, les jours et les nuits où le bruit ne s'arrête jamais

Montpellier, place de la ComédieUn mardi à Montpellier, trois heures le matin, quartier entre la gare SNCF, l'ancienne gare routière et la Comédie. Un groupe de jeunes traîne dans les rues. Quelques filles éclatent de rire - d'un rire fort et sonore - et des garçons poussent des hurlements de loups, d'autres aboient ou crient, tout simplement, comme si la vie leur faisait mal. À première vue, ils ont l'air ivres, mais quand on les observent de près, on remarque qu'ils n'ont rien bu ou très peu.

Un Monsieur d'une cinquantaine d'années passe, d'abord à un pas assez rapide - comme quelqu'un qui rentre tard à la maison et est pressé de gagner son lit -, puis il s'arrête et confronte les jeunes. "J'habite là-bas", explique-t-il d'une voix douce, sans colère, "et très souvent des gens comme vous me réveillent au milieu de la nuit. Pourquoi vous faites ça ? Vous ne pouvez pas respecter le sommeil des gens ? Il y en a qui travaille demain, ils ont besoin de dormir."

Le son calme de sa voix a d'abord étonné les jeunes et ils se sont arrêtés pour l'écouter. Mais à la fin de son petit discours, plusieurs filles et garçons éclatent de nouveau de rire. Un garçons recommence à crier, sans paroles, juste pour faire sonner sa voix - c'est évidemment le mot "travailler demain" qui a déclenché sa réaction.

Un autre, par contre, a visiblement envie de communiquer. "Ouais", dit-il d'un ton dédaigneux, "qu'ils dorment, les braves gens. Qu'ils aillent travailler tant qu'il y a encore du travail. Et qu'ils soient heureux. Pour nous, il n'y a plus de travail et plus de demain. Grâce à tous ces braves gens qui dorment sur leurs deux oreilles. Merci, les vieux, d'avoir préparé le monde des jeunes."

Son camarade a un discours moins engagé : "Qu'ils aillent se faire foutre, tes 'braves gens'." Et un autre commence à crier : "Réveillez-vous, on fait la fête..."

Les bus au centre-ville de Montpellier"Ses jeunes", termine le Monsieur le récit qu'il adressé à l'équipe de "Montpellier Presse Online", "ne sont pas méchants. Ils ne veulent pas nuire aux gens, mais ils sont énormément frustrés. Ils ne savent pas quoi faire de leur vie, et ils n'ont aucun espoir. Ils ont l'impression que personne ne les respecte - et ils ont appris à respecter personne, de leur côté."

Il est vrai qu'à Montpellier, on parle beaucoup du bruit des travaux et du trafic - qui, selon les statistiques, générerait 80 pour cent du bruit dérangeant la vie quotidienne. Mais les Montpelliérains du centre ville ont d'autres soucis sonores. "À Montpellier", rapporte une dame dans la quarantaine, "vous n'êtes jamais tranquille. Jusqu'à une heure, vous avez le bruit des bars. Quand ils ferment, ça ne veut pas dire que les gens rentrent - ils continuent leur nuit dans les rues. Et vous avez intérêt à rien leur dire, sinon, ils gueulent encore plus fort. Au petit matin, c'est les poubelles qui prennent le relais et, peu après, les livreurs. Finalement, les magasins ouvrent, les travaux reprennent, et tout commence de nouveau."

"La faute est à qui ?" s'interroge un Monsieur d'une soixantaine d'années. "À personne", répond-il lui-même à sa question. "La municipalité a tout essayé pour que les nuits en ville deviennent un peu plus calme. Ils ont restreint les heures d'ouverture et les surfaces des terrasses des bars et cafés. Ils ont interdit que les clients des bars fassent du bruit à l'extérieur. Mais tout cela ne sert à rien."

Les trams à Montpellier"Nous ne pouvons pas être derrière chaque client", confirme le patron d'un bar dans lÉcusson. "Ce n'est pas nous qui avons fait les lois contre les fumeurs. Les gens veulent fumer, alors ils sortent. En général, ils sortent à plusieurs et continuent leur conversation dehors. C'est normal qu'ils ne pensent pas toujours à baisser la voix, n'est-ce pas ? Quand ils quittent le bar", ajoute-t-il, "ils font ce qu'ils veulent, de toute manière. S'ils ne rentrent pas tout de suite, ce n'est pas sous notre responsabilité."

Quoi faire ? "Apprendre aux jeunes ce que veut dire 'respect'", propose une dame d'une cinquantaine d'années. - Juste aux jeunes ? - "Je n'ai pas besoin de me faire du souci pour le bruit de la ville", soupire une étudiante qui habite dans le quartier de Gambetta. "J'ai à la maison tout ce qu'il me faut... La famille en dessous de moi hurle tous les matins - les enfants, la mère, tout le monde - et pendant la journée et le soir c'est la musique ou la télé. Le soir, j'ai la télé en stéréo, du couple au-dessus de moi et d'en dessous. J'ai déjà essayé de leur demander de baisser le son. Ceux d'en haut s'excusent et m'assurent qu'ils feront attention. Mais ils ne changent rien. Et ceux d'en bas m'insultent dès que je leur dis quelque chose. Pour pouvoir étudier tranquillement, il faut que j'aille à la bibliothèque. Et le soir, si je ne veux pas être arrosée par les télés, je dois sortir. Pas question de travailler le soir, je dois attendre jusqu'à ce que tout le monde soit couché."

Le mot "respect" tombe aussi relativement aux travaux. "Quelque part là-haut", le Monsieur d'une trentaine d'années fait un geste vers le ciel, "ils ont juré de nous rendre sourds. D'abord, il est question des travaux du tram. Ensuite, ils ouvrent des rues, l'une après l'autre, sans le moindre rapport avec les trams. Ils travaillent la nuit, comme ils proclament, pour moins nous déranger. Et quand on n'entend pas les machines, on entend les ouvriers qui s'appellent, d'un bout de la rue à l'autre..."

"Avec tout le bruit dans Montpellier, qui pense encore aux voitures ? Comparées aux trams, aux trains, aux travaux, aux bars et aux jeunes dans les rues, on ne les entend presque plus", commente le Monsieur dans la cinquantaine qui a relaté l'histoire du groupe nocturne des jeunes au centre ville. Et il ajoute d'une voix sarcastique : "Allez, je vous laisse, parlons moins pour faire moins de bruit..."
Photos et texte : copyright Doris Kneller