vendredi 8 mai 2015

Vivre à Montpellier - la différence ?

Aimer Montpellier ou non : connaissez-vous la différence entre Montpellier et une ville du Nord ?

"Je ne pourrais jamais vivre dans une autre ville", s'extasie la dame dans la cinquantaine. Puis, elle raconte le cours de sa vie. Née près de Lyon, elle a déménagé à Paris pour son premier emploi, plus tard elle s'y est mariée et a eu des enfants. "Paris est devenu ma patrie..." ... jusqu'à ce que le divorce ait tout changé. "Je voulais vivre autre chose et me suis approchée d'une nièce vivant à Montpellier." D'abord, c'était par hasard qu'elle a choisi Montpellier. "Puis, je suis tombé amoureuse de la ville."

L'étudiante n’est pas d'accord avec la dame. "Je déteste Montpellier." Originaire de la Bretagne, cela fait six mois qu'elle a commencé ses études à Montpellier. "Je suis obligée de terminer l'année. Mais après l'été, je ne reviendrai pas."

Quelles sont les raisons qui font adorer ou détester la vie à Montpellier ? - L'équipe de Montpellier Presse Online s’est adressé une cinquantaine de Montpelliérains pour connaître leurs relations affectives avec la ville. Fait intéressant : parmi les interrogées il n'y en avait que deux qui étaient "neutres", c'est-à-dire qu'ils "aimaient bien" Montpellier, sans faire preuve d’émotions. Mais tous les autres étaient plutôt dans l’extrême : ils "adoraient" ou ils "détestaient" la ville.

"Pourquoi je n'aime pas Montpellier ?" répète par exemple une dame dans la trentaine la question de Montpellier Presse Online. "Parce que les gens sont trop superficiels. Tout le monde veut être votre ami, mais si vous avez besoin de quelqu'un, il n'y a plus personne."

Un Monsieur dans la soixantaine qui a passé "presque toute ma vie" à Montpellier a une réponse à ce reproche : "Ce n'est pas la première fois que je l'entends", explique-t-il. "Il reflète une des différences principales entre la vie dans le Sud et le Nord. Ici à Montpellier, la vie se déroule dehors, sur les terrasses des cafés ou des maisons. C'est donc facile de s'inviter sans qu'on soit obligé d'introduire l'autre dans sa sphère intime. On invite plus facilement, même les gens qu'on connaît à peine. Dans le Nord, par contre", continue-t-il, "il fait froid la plupart du temps. Si on invite, on invite chez soi, à l'intérieur de la maison. On hésite alors avant d'inviter quelqu'un qu'on connaît à peine - au contraire d'ici. Beaucoup des gens du Nord confondent ça avec être superficiel. Mais en vérité, ça témoigne d'un esprit très ouvert."

Une dame un peu plus jeune qui, elle aussi, aime beaucoup Montpellier a une explication plus simple : "Les gens ici ne sont pas superficiels, mais curieux. Ils aiment faire connaissance. Mais ce n'est pas toujours la grande amitié, tout de suite."

"Ce que je n'aime pas à Montpellier", critique une dame dans la quarantaine, "c'est que les gens font n'importe quoi dans la rue. Par exemple, quand les jeunes se bagarrent. Personne n’intervient, ils peuvent faire ce qu'ils veulent. - À Paris", ajoute-t-elle après une courte réflexion, "les gens ne s'occupent pas non plus des jeunes qui se bagarrent. Mais là, ils ont peur. Ici, ils n'ont pas peur, ça ne les intéresse pas, tout simplement. Ils s'arrêtent, regardent, rigolent, mais ils ne font rien. C’est la différence."

"Montpellier est une ville très bruyante", se plaint un Monsieur d’une cinquantaine d’années. "Les gens au Nord sont plus calmes. Ici, les enfants braillent toute la journée dans la rue ou dans les cours des résidences, on ne peut même pas ouvrir une fenêtre. La nuit, c'est la fête. Les gens boivent de l'alcool, et après c'est les cris et la musique forte jusqu'au petit matin. Aucun respect pour ceux qui doivent travailler."

Une dame dans la quarantaine parle du même phénomène, mais elle le considère d'un angle différent. "Dans le nord de la France, les gens se cachent dans leurs appartements, les fenêtres fermées. Chacun pour soi. Ici, la vie se passe dans les rues. Les voisins vivent l'un avec l'autre. On entend l'autre, on participe à sa vie, on n'est pas seul."

La solitude est un sujet dont parlent beaucoup de Montpelliérains. "Si vous vous sentez seul", raconte par exemple une dame dans la soixantaine, "vous allez dans un café et vous parler avec les gens des tables voisines. Avec un peu de chance, vous vous faites même des copines. À Paris, ça serait impensable."

"À Montpellier, il y a toujours quelque chose à faire", dit une dame dans la trentaine. Un vernissage, un concert, une discussion, une conférence et des centaines d'associations. Et il ne faut même pas être riche : beaucoup de manifestations sont gratuites. Ceux qui s'embêtent ici", ajoute-t-elle, "le font exprès."
Photos et texte : copyright Doris Kneller

mercredi 1 avril 2015

Montpellier : tram gratuit pour tout le monde

Après les grèves : la TaM offre aux Montpelliérains la gratuité des trams et bus une fois par mois

Nous ne sommes peut-être pas au bout des grèves qui perturbent le trafic des trams à Montpellier, mais l’usager peut maintenant compter sur une petite récompense. La direction de la TaM a enfin cédé à la pression de la CGT, selon laquelle les utilisateurs des trams, victimes innocentes des querelles entre les employés et les employeurs dans le transport public, devraient être « un peu consolés ».

Le jour choisi par la direction de la TaM est le premier dimanche de chaque mois - « comme le musée Fabre », remarque une dame dans la cinquantaine interrogée par l’équipe de Montpellier Presse Online. D’abord, il n’était question que de désactiver les machines à composter les tickets pour une journée. Toutefois, ce geste aurait défavorisé les usagers réguliers avec un titre de transport mensuel ou annuel. C’est pourquoi, finalement, il a été décidé que chaque utilisateur d’un titre de transport à long terme sera remboursé lors du renouvellement de sa carte, au niveau de deux euros par mois, correspondant à deux voyages le dimanche désormais libre.

Ce qui est étonnant : la nouvelle n’est pas encore très répandue. Jusqu’à maintenant, les journaux locaux se contentent d’une petite notice à l’intérieur de leurs éditions, la télé n’en a même pas parlé. « C’est un scandale », critique une dame dans la quarantaine. « Je veux dire, la mesure est louable, mais les gens doivent en être informés. Le manque d’information donne l’impression que la TaM ne voudrait pas qu’on le sache. Pour que peu de personnes en profitent. »

L’équipe de Montpellier Presse Online voulait surtout savoir, si les usagers des trams et bus sont déjà informés de la nouvelle mesure - qui, pour la première fois, entrera en vigueur le dimanche de Pâques - et ce qu’ils en pensent. « Oui, mon voisin m’en a parlé », commente un Monsieur dans la quarantaine. « Et lui, je crois, l’a lu quelques part, sans doute dans un journal. Mais l’idée de commencer un dimanche de Pâques me semble bizarre : comme si on voulait surtout faire profiter les touristes et donner une bonne réputation à Montpellier. »

Toutefois, un assez grand nombre des Montpelliérains interrogés n’était pas au courant de la nouvelle mesure. « Ce dimanche ? », demande par exemple un Monsieur dans la trentaine. « Non, je ne savais pas. Dommage, je ne serai pas à Montpellier pendant Pâques, je ne pourrai donc pas profiter. »

Une dame dans la cinquantaine n’est pas très enchantée. « Les dimanches, les trams sont déjà pleins à craquer », se plaint-elle. « Parce qu’il y en a pas beaucoup. Si, maintenant, il y a en plus un dimanche où les gens ne doivent pas payer, il y aura tant de monde qu’on ne pourra plus respirer. »

La dame n’est pas la seule à critiquer le choix du dimanche. Beaucoup pensent spontanément au fait que, ce jour-là, il y a relativement peu de trams et de bus qui circulent. « A première vue », constate par exemple un Monsieur dans la quarantaine, « ce geste semble généreux. Mais, de toute manière, il ne concerne pas beaucoup de rames ou, plus précisément, moins de rames qu’un jour ouvrier quelconque. Ainsi, l’action est moins chère qu’elle n’a pas l’air. »

Une dame un peu plus âgée que le Monsieur se met à rire. «  Non, je n’étais pas informée, mais ce n’est pas étonnant, je ne lis pas souvent les journaux d’ici. Mais », rigole-t-elle, « c’est si typique pour notre TaM que de choisir un dimanche : ce jour-là, les contrôleurs sont plus chers - j’imagine qu’on leur paie le tarif de week-end - et il y a beaucoup plus de ‘fraudeurs’, comme on appelle maintenant les gens qui ne compostent pas leurs tickets. C’est donc une bonne idée de se montrer ‘généreux’ et de permettre à tout le monde de ne pas payer. »

Toutefois, la plupart des interrogés sont contents de la mesure. « Nous avons assez morflé avec tous les grèves », souligne une dame dans la trentaine. « Mais, quand même, ils n’auraient pas eu besoin de nous récompenser - c’est donc un geste positif. Bravo, la TaM. »

Un Monsieur dans la cinquantaine est d’accord avec elle. « On ne peut rien dire », constate-t-il, « c’est un geste digne d’une société qui est proche de l’usager. Dommage, seulement, que ce soit un dimanche. Un jour de la semaine aurait été plus utile, un mardi ou mercredi, par exemple. Ces jours-là, ma femme prend souvent le tram pour aller faire des cours - elle aurait donc pu épargner un ticket. » Une étudiante de quelques vingt ans est plus ou moins du même avis : « Je ne peux pas le croire », s’étonne-t-elle. « C’est presque trop beau pour être vrai. Il est rare de voir de tels gestes commerciaux. J’en suis éblouie. Mais, bien sûr, je trouve ça formidable. »
Photos et texte : copyright Doris Kneller

mardi 31 mars 2015

Montpellier : Journée internationale des forêts

Montpellier, l'Hérault, les arbres et les forêts

Pour la troisième fois, Montpellier participe activement à la « Journée internationale des forêts » proclamée par l’ONU. De diverses manifestations ont été programmées, étalées entre le 21 mars - la journée officielle - et le 28 mars 2015. Certainement une « démonstration de la bonne volonté du côté de la municipalité », comme l’exprime un Monsieur dans la trentaine - mais qui, selon la critique de plusieurs Montpelliérains, n’aurait « rien à voir avec l’écologie et l’amour des arbres et de la nature. »

L’équipe de Montpellier Presse Online a voulu savoir, si les Montpelliérains sont au courant de la nouvelle institution d’une « Journée internationale des forêts » et ce qu’ils en pensent. Une des premières réponses qu’elle a reçue - et, en même temps, une des plus fréquentes - cible les « journées internationales » en général : « Journée de la femme, journée de l’artisanat, journée de l’enfant, journée de l’arbre… et quoi encore ? », se fâche par exemple une dame dans la quarantaine. « Ils nous bombardent avec des ‘journée de…’, mais ça ne donne pas de sens. »

Une dame dans la cinquantaine est encore plus amère : « Ils ont inventé la journée de la femme pour avoir une raison de ne pas penser aux droits des femmes qu’une seule fois par année. Pareil pour la journée mondiale de la paix ou celle de la terre. Maintenant, ils cherchent un alibi pour ne plus penser aux arbres, 364 jours par an. » Et un Monsieur d’à peu près le même âge ironise : « Saviez-vous qu’il y a déjà une ‘Journée mondiale sans Facebook’ ? Oui, oui, je ne blague pas, c’est le 28 février… »

Il y a peu de Montpelliérains qui sont prêts à prendre au sérieux les Journées nationales, internationales ou mondiales. « Le 27 mars, on a fêté la ‘Journée nationale du Sommeil’. J’imagine que beaucoup de gens l’ont prolongé jusqu’au 29 - ça expliquerait le nombre des Français qui n’ont pas voté », rigole un Monsieur dans la trentaine en faisant allusion au taux élevé des abstention pendant les élections départementales 2015, tandis qu’une dame d’à peu près le même âge rappelle : « N’oubliez surtout pas que, demain, le premier avril, on a la journée de la blague. » Une dame dans la quarantaine, par contre, montre un humour particulier : « Oui, bien sûr, mon chien participe toujours à la journée des forêts. Il s’arrête à chaque arbre. »

Mais blague de bon ou mauvais goût, il y a aussi beaucoup de Montpelliérains qui trouvent que l’arbre est essentiel pour la vie. « Ici, en ville, » dit par exemple une dame « née à Montpellier » il y a une soixantaine d’années, « on oublie facilement l’impact de la nature sur notre vie et notre santé. On pense qu’on peut tout régler avec les machines. Mais quand on tombe malade, on se rend vite compte que l’environnement joue un rôle existentiel. »

Une étudiante de quelque 25 ans est assez bien informée. « Oui, j’ai entendu parler de la journée de la forêt ou de l’arbre, je ne me rappelle plus bien du titre. Je crois que les médiathèques de Montpellier ont fait une exposition sur le sujet. Et quelques villages organisent des activités pour les enfants. »

Une autre Montpelliéraine, plus âgée de quelques 10 ans et mère de deux enfants n’est pas contente des activités qu’on a proposées à sa fille : « Avec l’école, ils sont allés dans la nature pour jouer. Ils ont ramassé des feuilles et des brins d’herbe pour les coller dans leurs cahiers. Ensuite, ils avaient le droit de jouer, et ils ont mangé dehors. Pour moi, ce n’est pas une manière d’expliquer la forêt aux enfants. Ils n’ont rien appris sur les arbres et leur signification pour l’écologie. »

« Oui, je suis au courant », répond aussi une dame dans la cinquantaine. « J’ai étudié la liste entière des manifestations qui ont été organisées à Montpellier et aux environs. Mais je n’appelle pas cela une Journée de la Forêt ou, de toute manière, pas dans mon sens. Parce que pour moi, la forêt est un endroit de paix et de santé mentale et physique. Mais les organisateurs des manifestations pensent à son exploitation, l’utilité du bois pour ce qu’ils appellent la ‘civilisation’ et la façon la moins chère de détruire les quelques forêts qui nous restent. »

La plupart des Montpelliérains interrogés n’était cependant pas au courant de l’existence d’une Journée internationale de la Forêt. « La presse est pleine d’histoires sur les catastrophes et de politique. Mais on est beaucoup moins informé sur les événements culturels ou, dans ce cas, écologiques », se plainte un Monsieur dans la cinquantaine. Et une dame un peu plus jeune que lui va dans le même sens : « Qui s’intéresse à une journée de la forêt au milieu des élections ? »

Toutefois, en général, les habitants de Montpellier sont pour le maintien de la journée, bien que certains pensent qu’il faudrait plus en parler pour que les gens sachent qu’elle existe. « Nos enfants ne savent plus rien de la nature », commente une dame dans la quarantaine. « Il est temps que nous recommençons à leur montrer sa beauté. Chaque enfant devrait avoir le droit de grandir sous de vrais arbres, je veux dire des arbres dans leur milieu naturel. Ou, pour ceux qui sont obligés de grandir en ville, y passer le plus de week-ends et de vacances possibles. »

« J’ai visité l’exposition à la médiathèque Federico Garcia Lorca, et je sais qu’il y a des clubs photo qui ont également travaillé sur ce sujet », se rappelle une dame dans la trentaine. « Mais, franchement, je préfère me promener dans la nature que visiter des expos sur la nature. » Un Monsieur d’à peu près le même âge est d’accord avec elle : « Les arbres ne se contemplent pas sur des photos. Pour les connaître, il faut les toucher, sentir leur écorce, se délasser dans leur ombre. Observer les animaux qui y habitent. » Et une dame dans la cinquantaine : « J’ai vu un groupe d’enfants dans la médiathèque. Les photos des arbres ne les ont pas fascinés du tout. J’avais envie de les prendre par leurs mains et partir avec eux - dans une véritable forêt. »  
Photos et texte : copyright Doris Kneller

lundi 30 mars 2015

Elections départementales à Montpellier : le deuxième tour

Quels sont ces Montpelliérains qui ont préféré s'abstenir aux élections départementales ?


Dans ces jours des élections, il y en a beaucoup qui se demandent qui a voté pour qui et, surtout, qui a voté pour le Front National. Mais il y une autre question à poser, une question concernant pratiquement la moitié de tous les Français qui ont le droit de voter et dont la réponse sculpte le paysage politique plus que tous les bulletins de vote : Pourquoi tant de personnes n’ont-elles pas fait usage de leurs droits civiques ? - Pourquoi n’ont-elles pas voté ?

Face à 45,62 pour cent d’abstention dans l’Hérault, 5,62 pour cent de votes blancs, 2,53 pour cent de votes nuls et, déjà à la base, uniquement 73,58 pour cent d’inscrits (source) l’équipe de Montpellier Presse Online voulait savoir, pour quelle raison tant de Montpelliérains n’ont pas entamé ce dimanche la voie aux urnes. Au début, sa tâche ne semblait pas facile : si beaucoup d’électeurs sont entretemps prêts à confier aux autres leur choix de parti, il n’y en a que peu qui « avouent » avoir manqué à leurs « devoirs de citoyens ». Mais, finalement, Montpellier Presse Online pouvait se baser sur une bonne centaine de réponses sérieuses.

L’argument le plus fréquent était sans doute la lassitude, le « ras-le-bol » de la politique. « La droite utilise les arguments de la gauche », se plainte par exemple un Monsieur d’une cinquantaine d’années, « et la gauche fait une politique de droite. Pour qui voulez-vous qu’on vote ? Autant ne pas y aller… »

« Les Français sont devenus fous », se fâche une dame dans la trentaine. « Ils n’ont absolument rien appris de l’histoire. S’ils veulent le mal, ils l’auront. Moi, je me lave les mains - je ne participe plus, même pas par un vote. »

Toutefois, il n’y a que peu de Montpelliérains qui ont des idées aussi extrêmes que cette dame. « Je ne sais pas pour qui voter », explique une dame dans la quarantaine et exprime l’opinion de beaucoup des personnes interrogées, « et ce n’est certainement pas ma petite voix qui change quoi que ce soit. Pour moi, ils sont tous pareils, à droite, à gauche, ils ne pensent qu’à leur propre portemonnaie. »

Beaucoup de Montpelliérains regrettent aussi que le vote blanc n’est pas pris au sérieux. « J’ai voté blanc », confie une dame un peu plus jeune à l’équipe de Montpellier Presse Online. « Je souhaite que les politiciens comprennent que je ne suis pas d’accord avec eux - avec personne parmi eux. »

Un Monsieur d’une trentaine d’années, par contre, se fâche contre tous ceux qui « ne votent pas, votent blanc ou pour un petit parti qui n’a aucune chance à barrer la route à l’extrême droite et qu’ils n’utilisent que pour pouvoir dire qu’ils auraient voté. » Lui-même, avoue-t-il, n’aurait pas voté non plus : il aurait été obligé de se déplacer à court terme, et il ne connaîtrait personne à qui il aurait pu confier sa procuration. « En politique, je me méfie de tout le monde. Qui me dit que je ne choisis pas quelqu’un qui abuse de ma procuration pour voter pour le FN ? Aujourd’hui, on ne sait plus qui vote pour ce parti. »

« Si je ne vote pas », dit un autre Monsieur d’à peu près le même âge, « c’est que je n’ai plus aucun espoir. Que, au contraire, je souhaite accélérer le désespoir. Vous êtes étonné ? Ne regardez pas seulement la France - le monde entier est dans un état désespéré. Les gens se créent des systèmes de pouvoir avec qui ils sont incapables de vivre. Le résultat : ils vivent mal, sont malheureux, mécontents de leur quotidien. Mais au lieu de changer eux-mêmes, de rectifier leur choix de mode de vie, ils cherchent la solution chez les puissants : parfois à gauche, parfois à droite, sans trouver leur bonheur. Évidemment. En ce moment, c’est de nouveau - comme déjà souvent dans l’histoire - la tendance à droite. Je sais, je sais, si je ne vote pas, je donne indirectement une voix pour l’extrême droite. Mais, de toute manière, nous y arriverons, c’est la loi de l’histoire. Chaque vote contre l’extrême droite ne saurait que ralentir le procès naturel. Autant laisser l’histoire suivre son cours - plus vite l’extrême droite prend le pouvoir, plus vite la catastrophe arrive et, comme le veut l’histoire, plus vite l’horreur passe pour laisser la place à quelques dizaines d’années de moindre mal… »

Mais pas tout le monde n’a des considérations si profondes. « C’était hier qu’il fallait voter ? », demande une dame dans la quarantaine. « Tiens, j’ai oublié. » Et un Monsieur dans la cinquantaine : « J’aurais voté, évidemment, mais c’était l’anniversaire de ma sœur à Nîmes. On est partis trop tôt et rentré trop tard pour voter. » Et une dame dans la cinquantaine : « J’avais l’intention ferme d’aller voter. Mais il faisait froid et je n’avais pas d’autre raison pour sortir. J’ai donc préféré passer la journée bien au chaud dans mon lit. »

Une dame dans la trentaine soupire quand l’équipe de Montpellier Presse Online lui pose la question. « Je vous jure, je voulais voter. Mais je ne pouvais pas, pour des raisons familiales. Et je ne suis certainement pas la seule. Si je pense à cette force politique représentée par tous ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas voter, je suis impressionnée. Si on avait tous voté, les résultats seraient différents. Une force énorme qui ne s’exprime pas. On est tellement nombreux et on pourrait être tellement fort qu’on pourrait créer notre propre parti - et il aurait toutes ses chances de gagner aux prochaines élections. »
Photos et texte : copyright Doris Kneller

lundi 23 mars 2015

Montpellier et les élections départementales

Montpellier : Qui a voté pour le Front National ?

Un grand quotidien a divulgué la nouvelle : voter pour le Front National n’est plus une « honte ». Maintenant, les gens en parleraient ouvertement. Par conséquent, Montpellier Presse Online a voulu savoir qui sont les presque 32 pour cent qui, dans l’Hérault, ont voté pour la droite extrême. Sont-ils prêts, maintenant, d'en parler ouvertement ?

« Si j’ai voté pour le Front National ? C’est une blague ? » La dame dans la quarantaine a l’air de ne savoir si on l’insulte ou si on se moque d’elle. « Mais quelle idée. Ai-je l’air de quelqu’un qui ne sait pas ce qu’il fait ? »

« Vous souhaitez savoir qui a voté pour le parti Le Pen ? » réagit un Monsieur dans la cinquantaine. « Les Arabes, j’imagine. » Puis, il ajoute : « Faut être complètement zinzin pour poser une telle question. »

La plupart des réponses récoltées par l’équipe de Montpellier Presse Online se ressemblent : les Montpelliérains se fâchent. L’idée qu’ils auraient pu voter pour l’extrême droite les horrifie. Toutefois, les partisans du « bleu marine » se cachent-ils ou ne les rencontre-t-on pas dans les rues ?

« Qui a voté pour le Front National ? » répète un autre Monsieur, lui aussi dans la cinquantaine, la question. Il réfléchit. « D’abord, je pense, tous les gens qui ne sont pas contents de la situation politique actuelle. Les élections d’hier ne sont pas très importantes, c'est-à-dire qu’elles n’ont pas un impact énorme sur le jeu du pouvoir. Beaucoup les ont utilisées pour donner un avertissement aux partis classiques. Il faut qu’ils comprennent que la France a besoin d’un changement. »

« Dans dix ans, on aura peut-être compris », répond une dame dans la trentaine qui, comme elle dit, se sent très abattue aujourd’hui, face aux résultats des élections. « Il est vrai, on aurait dû y compter, après les sondages et tout. Mais j’ai espéré un miracle. D’un autre côté, on peut les comprendre : la gauche ne fait que la politique de la droite, la droite présente un leader dont la France a eu marre il y a déjà longtemps, et les autres partis ne sont pas assez forts. Dans dix ans, peut-être, tout changera de nouveau. Mais pour le moment, tout est fichu. »

« Moi, je vote pour le parti écologique », explique une autre dame, une dizaine d’années plus âgée que la précédente. « Mais il est vrai que les verts n’ont pas bien réussi, hier. Ce qui est logique. Tout le monde s’est dit qu’il faut voter ‘utile’, pour barrer le chemin aux Le Pen. »

Et enfin : « Oui, j’ai voté pour le FN. » Il s’agit d’une dame dans la quarantaine, assez élégamment vêtue. « Et je peux vous dire, pourquoi. J’en ai marre de la dictature des étrangers. Dans le tram, vous n’entendez presque plus le français. Dans mon quartier, ils ont brûlé des voitures. Pendant la nuit, les jeunes Magrébins sont dans la rue, jusqu’à deux ou trois heures du matin, ils gueulent et font marcher leurs radios à un volume que personne ne peut dormir. Ils s’en foutent de ceux qui doivent travailler - eux ils ne travaillent pas. Et à qui la faute ? A la police. Nous avons essayé, plus d’une fois, d’appeler la police pour qu’elle intervient contre ce bruit nocturne insupportable. Mais là, vous pouvez attendre longtemps. Les jeunes Magrébins peuvent faire ce qu’ils veulent, la police est de leur côté. »

Une autre dame d’à peu près le même âge parle également du sujet des Magrébins dont on dit qu’ils dérangeraient tout le monde. « D’abord », souligne-t-elle, « ce ne sont pas exclusivement des Magrébins, mais tout simplement des jeunes qui sont mal dans leur peau. Des jeunes Français, entre autres. Quant aux jeunes Magrébins, je veux dire des jeunes Français dont les parents sont nés dans un pays de Maghreb, qu’est-ce qu’ils ont dans la vie ? On ne leur donne pas de travail, ils sont exclus par le système. Tous les jours, ils sont confrontés avec le mépris de leurs concitoyens. Mais ils sont jeunes, ils veulent vivre, profiter des biens de la société. Alors ils se prennent ce qu’ils pensent qu’on leur doit. » Elle hésite, puis continue : « Oui, il faut changer de politique. Il nous faut une politique qui fait comprendre aux gens qu’il n’y a pas Français et Français, mais uniquement Français. Il faut la même éducation pour tout le monde et les mêmes chances. Nous avons des hommes politiques qui travaillent pour ce but, mais ils ne sont soutenus par personne et, avant tout, ignorés par la presse. »

Le sujet de la presse est également mentionné souvent : « Qui vote pour le FN ? La presse, bien sûr », dit par exemple un Monsieur dans la cinquantaine. « Prenez seulement l’affaire du footballeur suédois. Il a fait un petit faux pas - la presse en aurait parlé pendant une journée, peut-être, pas plus. Mais comme Marine Le Pen l’a utilisé pour faire sa publicité, tous les média l’ont soutenue. On devrait se demander si elle n’a pas payé le Suédois pour trouver un moyen supplémentaire de publicité - et les média pour, encore, ne parler que d’elle. »

« Non, je n’ai pas voté pour le FN », répond une dame dans la trentaine. « Je crois à un vote de signalisation. Les gens signalent qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Que, en fait, rien ne va plus. Et soyons honnêtes : pouvez-vous me nommer un seul politicien, parmi ceux qui ont une chance d’être élus à l'Elysée, qui est prêt ET capable de nous aider ? De donner du travail aux chômeurs ? Non. Mais attendons le deuxième tour, il nous montrera ce que les Français pensent vraiment. »
Photos et texte : copyright Doris Kneller