lundi 25 avril 2011

Parc Méric : le ZAT à Montpellier

La deuxième épisode des ZAT à Montpellier : de l'Antigone au parc Méric

Le ZAT à MontpellierLa dame à l'accueil reste positive. Le petit train, explique-t-elle aux gens qui demandent, devraient arriver à chaque minute. "Et comment fera-t-il pour passer par les foules dans la rue de Ferran ?", s'inquiète une dame. "Ne vous faites pas de souci", la rassure la dame gentiment, "il klaxonnera et les gens s'écarteront."

Une navette entre le tram et l'entrée du parc Méric où, le week-end de Pâques, se déroule la deuxième édition - ou "épisode" - des ZAT - des Zones Artistiques Temporaires - à Montpellier, c'était certainement une bonne idée : comme tous les parkings sont fermés pendant les ZAT et, par conséquent, les voitures sont interdites, comme le tram s'arrête à six cents mètres du parc... et comme l'accès à l'art devrait être possible aussi aux personnes à mobilité réduite, les organisateurs se sont dit que la solution d'un "petit train" serait certainement la meilleure.

Philippe Pradalié peint Frédéric BazilleCependant, ils n'avaient pas compté avec la curiosité des Montpelliérains. Ou avec leur amour de l'art. Ou, tout simplement, avec leur envie de sortir un dimanche de Pâques ensoleillé après un samedi pluvieux... De toute manière, personne n'aurait eu l'idée qu'une telle foule se précipite au parc Méric le deuxième jour des ZAT - une foule si dense que les deux petits trains censés assurer le trafic sur la rue de Ferran étaient condamnés à rester immobiles sur un parking écarté.

On aurait toutefois dû s'en douter. Car déjà la première épisode du ZAT à l'Antigone, en novembre 2010, a mobilisé un nombre étonnant de Montpelliérains. Le jour de l'ouverture, Hélène Mandroux, maire de Montpellier, contente du succès du projet qu'elle avait encore planifié avec George Frêche, avait déclaré à l'équipe des Gens de Montpellier : "La ZATest bien accueillie d'emblée. Cela prouve que la population de Montpellier est ouverte à l'art."

Mais tandis que les premières ZAT avaient lieu à L'Antigone, c'est-à-dire dans un quartier connu par tous les Montpelliérains, la deuxième édition s'est établie à un endroit beaucoup plus romantique et, avant les ZAT du week-end de Pâques, encore peu connu. Car bien que le parc Méric soit ouvert depuis 1992, peu de Montpelliérains ont, jusqu'à lors, pris l'habitude de profiter de ses douze hectares de forêt et de près sauvages pour y passer leur dimanche.

Zat Montpellier : Yoann Bourgeois sur le trampolineLe commentaire d'une mère de famille n'est alors pas "atypique" pour les visiteurs de la deuxième édition des ZAT à Montpellier : "Oui, on est venus pour voir les spectacles, mais surtout, parce que c'est une bonne occasion de connaître le parc Méric." Ou une autre dame qui parle pour elle-même, son mari et ses trois filles entre huit et quatorze ans : "On connaît déjà la ZAT, de l'Antigone. Et comme ils ont dit que les spectacles seraient encore plus intéressants, on est venus ici. Mais il y a trop de monde, on ne voit rien." Et son mari ajoute : "Dès qu'un spectacle commence, tout le monde se précipite et les plus forts sont devant. Mais nous ne sommes pas déçus. Même si on n'a pas vu grand-chose des spectacles, on a découvert un parc magnifique." - Quand même... la plus jeune fille de la famille se dépêche d'affirmer qu'elle avait réussi à voir le spectacle de Yoann Bourgeois qui, sur son trampoline, "interroge le vertige" : "Il était fort, ce Monsieur sur le trampoline."

Et là, pratiquement tous les visiteurs étaient d'acord : "Ce parc est très beau", et : "On reviendra un autre jour."

L'équipe des Gens de Montpellier voulait savoir, quel spectacle était le plus impressionnant. Un Monsieur d'une soixantaine d'années qui est venu avec sa femme réfléchit. "Je ne sais pas", explique-t-il finalement, "le parc est si grand. On ne sait jamais ce qui se passe où. Les jeunes hommes qui y travaillent sont bien aimables, mais ils ne peuvent pas répondre à tout le monde." De nouveau, il réfléchit. "Le tableau de Philippe Pradalié m'a assez impressionné."

Le deuxième ZAT à MontpellierL'œuvre de Philippe Pradalié, lui-même présent à Montpellier pour les ZAT, qui montre Frédéric Bazille et son tableau de Pomone, la divinité des jardins, est exposée dans l'Orangerie du mas de Méric. C'est ici que Frédéric Bazille a trouvé le calme dont il avait besoin pour peindre. Le tableau de Philippe Pardalié a attiré tant de monde que les organisateurs étaient obligés de distribuer des jetons pour éviter que plus de 150 visiteurs entrent en même temps à l'Orangerie.

La plupart des visiteurs du ZAT, toutefois, aimaient le plus les petits bonhommes qui, pendant trois jours, peuplaient le parc Méric. Les Pheuillus ou "anges dans le paysage", comme leurs créateurs les ont baptisés, guettent partout : sur les lampadaires, sur les clôtures, dans les arbres. Ils promènent leurs chiens dans la prairie, ils pêchent au milieu du Lez, ils font leur pique-nique au soleil. Leur "chair", c'est les feuilles mortes qui se réunissent pour engendrer ces petits êtres si humains... ou peut-être moins humains, si l'on voit leur patience, leur bien-être, le calme avec lequel ils envisagent la vie. Pour leurs créateurs, ils évoquent l'esprit de Frédéric Bazille qui, chez lui au domaine du Méric, a trouvé son bonheur en peuplant le paysage de personnages. Pour une jeune Anglaise, étudiante à Montpellier, ils évoquent plutôt la vie à Montpellier : "C'est l'impression que j'ai des Montpelliérains", dit-elle avec un sourire. "Ils aiment le soleil et la vie, et ils savent apprécier la beauté de leur pays."
Photos et texte : copyright Doris Kneller

vendredi 15 avril 2011

La voix des gens du Sud de la France

Les gens du Sud de la France ont "des choses" à dire : interviews et micro-trottoirs

Les gens dans la Sud de la FranceEst-ce vrai qu'ils sont "superficiels" ou "froids" comme le prétendent "certains" habitants du Nord de la France ? Ou sont-ils plus ouverts que les autres ? Le soleil les rend-il paresseux ? Et les blagues sur le fameux "quart d'heure" montpelliérains ou perpignanais ou nîmois ou... signifient-elles que les gens du Sud de la France ne sont jamais ponctuels ?

La nouvelle Revue online des Gens du Sud de la France veut savoir ce qui se cache derrière tous ces préjugés. Son équipe se promène dans les rues de Marseille, de Montpellier, de Nîmes, de Perpignan, de Narbonne, de Béziers,... bref, dans toutes les villes et souvent dans les villages qui forment le Sud de la France, ce pays près de la Méditerranée, et elle parle avec les gens. Elle leur pose des questions sur leur vie et leur demande leurs avis sur les sujets qui déterminent leur quotidien.

Mais avant de constater comment vivent les gens du Sud de la France, l'équipe de la Revue online interroge les Français du Nord et du Sud pour savoir, ils vivent : où se trouve ce fameux Sud de la France ? Selon un sondage de France Soir et Ipsos, 43 pour cent des Français aimeraient bien vivre à Montpellier. Toujours est-il que la ville compte chaque année quelque 10.000 "Nouveaux Montpelliérains".

La vie des gens près de la MéditerranéeQui sont-ils, ces gens du Sud de la France ? Peut-on les "catégoriser" ? - Et doit-on être né dans le Sud pour en faire partie ? Selon Gabriel Preiss, anthropologue à Montpellier, une "ville appartient à celui qui s'y sent bien, peu importe s'il y passe une vie, des années, des heures" - tout le monde fait partie des "gens du Sud" sous condition qu'il souhaite en être.

Un Monsieur de Béziers interrogé par l'équipe des "Gens du Sud de la France" traite la question d'un œil plus critique. D'après lui, les "Gens du Sud" en général n'existent pas. Déjà, chaque ville a sa propre histoire, son propre caractère, sa propre politique - et son taux de chômage. Mais la plupart de ces villes ont quelque chose en commun : les chantiers. "Circuler en voiture est un problème qui concerne pratiquement toutes les villes du Sud de la France", constate une Parisienne qui, chaque année, visite la région de la Méditerranée. "Les unes construisent leur tram, les autres leur trambus, encore d'autres aménagent des routes et des parkings. Bref, il y a des travaux partout."

Même si la "Revue online des Gens du Sud de la France" informe ses lecteurs parfois des sondages "officiels" publiés par des organismes comme Ipsos, elle ne fait pas elle-même des enquêtes "représentatives". Son équipe interroge tout simplement les gens dans la rue, des micro-trottoirs qui se déroulent au "cœur" des événements ou, plus souvent encore, de la vie quotidienne. "Nous sommes proches des gens, nous observons leurs visages pendant qu'ils parlent, nous sentons leur colère et leur joie. C'est ce qui fait plaisir dans notre travail : on ne parle pas des gens, on les laisse parler eux-mêmes."

Montpellier, Nîmes, Béziers, Perpignan...: les gens du Sud de la FranceToutefois, parmi tous ces gens "anonymes" dans la rue - dont l'anonymat se lève dès qu'ils parlent de leur vie, qu'ils donnent leur opinion ou qu'ils offrent un sourire - il y en a dont les visages sont plus familiers que ceux des autres. Par exemple ceux des artistes - les peintres comme André Leclerc ou les artistes qui exposent leurs œuvres aux foires d'art telles que le Corum des Peintres à Montpellier, les chanteurs comme le Catalan Jordi Barre ou ceux ou celles qui sont si importants pour la vie des gens du Sud de la France : les créatrices et créateurs des entreprises et associations qui refusent le chômage et dont les services facilitent ou embellissent souvent le quotidien.

Mais il y a une "catégorie" de gens qui ne trouve pas son entrée dans la Revue online des Gens du Sud : les héros, les "hyper-connus", les vedettes, les stars. Parce qu'il n'y a pas de "stars" parmi les gens du Sud de la France. Ceux qui se distinguent par leurs œuvres artistiques ou économiques restent des gens simples comme les autres, ouverts à tout contact, amoureux du soleil. Car, même si, dans le Sud de la France, il n'y a pas deux personnes qui sont "pareilles", tout le monde a quelque chose en commun : l'amour du soleil... et le fait d'avoir "des choses" à dire. C'est pourquoi la "Revue online des Gens du Sud de la France" a été créée.
Photos et texte : copyright Doris Kneller

vendredi 8 avril 2011

André Leclerc, artiste peintre à Montpellier

Trompe-l'œil et papiers peints panoramiques : l'artiste peintre qui décore les murs et les maisons

André Leclerc, artiste-peintre à MontpellierÀ première vue, André Leclerc est un artiste peintre absolument "ordinaire" - sous condition que l'on part du principe que tout peintre "ordinaire" a un talent extraordinaire. "Avec André Leclerc", a dit une dame en contemplant une des peintures en trompe-l'œil réalisées par le Montpelliérain, "on a l'impression d'apprendre à voir." Et elle n'a pas tort.

Car lorsque André Leclerc regarde un paysage, un groupe de maisons ou tout autre motif, il enregistre chaque détail, comme si ses yeux fonctionnaient comme un appareil photo. En fait, il ne travaille jamais d'après photo - il veut voir la réalité avant qu'il la peigne. Ensuite, il fixe sur la toile tout ce qu'il a vu, et il arrive qu'un spectateur découvre un détail sur le tableau qu'il n'a pas remarqué lorsqu'il contemplait le modèle réel. Mais si, plus tard, il cherche ce détail dans la réalité, il peut être sûr de le trouver.

Les trompe-l'oeil d'André Leclerc, Montpellier
Toutefois, André Leclerc ne peint pas seulement sur toile. Ses œuvres se trouvent aussi sur des murs à l'intérieur et à l'extérieur des maisons. Et c'est cela qui le distingue de la plupart des artistes peintres non seulement à Montpellier : il est maître des trompe-l'œil.

Déjà, pour réussir un trompe-l'œil, il ne faut pas seulement avoir la vue du détail, mais aussi de l'ensemble. Pendant son travail, le peintre, petit devant le mur qu'il décore, ne voit jamais qu'une partie infime de son œuvre. Même quand il peint les grandes structures, il n'en aperçoit que le détail sur lequel il se penche en ce moment.

Ainsi, quand André Leclerc peint un de ses trompe-l'œil, il se sert de "deux" pairs d'yeux : ses yeux "physiques", avec qui il regarde travailler ses mains, et son esprit qui, comme un "deuxième" pair d'yeux, garde en vue l'image de l'ensemble.

Il est clair que, pour un amateur, cette technique paraît énormément difficile. Mais pour l'artiste peintre de Montpellier, elle est si "normale" qu'il a du mal à comprendre que pas tout le monde peut peindre des trompe-l'œil. Toutefois, pour ceux qui connaissent un peu André Leclerc, cette attitude n'est pas étonnante. Malgré son talent, le Montpelliérain est un homme très simple. "On dirait qu'il n'est même pas conscient de son grand talent", a commenté une dame qui, lors d'un vernissage, a fait sa connaissance. "Lorsqu'on lui dit qu'on admire son œuvre, il sourit, et on sent qu'il est content. Mais on a l'impression qu'il n'est pas prêt à nous croire."

Artiste peintre à Montpellier : André Leclerc et les trompe-l'oeilPour que ses trompe-l'œil reste conservés le plus longtemps possible, André Leclerc s'est aussi penché sur les techniques de peinture applicables à de telles œuvres. Il a constaté qu'il ne peut pas utiliser la peinture à l'huile : "La peinture à l'huile sèche trop lentement", explique-t-il, "et, par conséquent, le risque que des intempéries gâchent tout est trop grand." Il a alors décidé de se servir de l'acrylique et, après la finition du trompe-l'œil, d'y ajouter un vernis brillant, satiné ou mat. "La nature du vernis dépend du motif et du support, mais aussi du goût du client", soutient André Leclerc, et il ajoute avec un sourire modeste : "Je veux tout simplement que son trompe-l'œil lui plaise."

Mais l'artiste peintre de Montpellier a encore une autre "spécialité" : les papiers peints panoramiques. Il n'aime pas trop les papiers peints industriels - car, pour lui, un papier peint doit être "peint". Ainsi, il a eu un jour l'idée de faire revivre les techniques traditionnelles du 18e siècle. D'abord, toutefois, il a dû se procurer les moyens pratiques pour entamer son œuvre. Il utilise donc un support qui est spécialement conçu pour la peinture à l'eau qu'il traite selon des processus développés par lui-même. Ensuite, il réalise le papier peint panoramique - parfois des scènes inspirées par les anciennes décorations murales des maisons nobles ou, souvent, des imitations des fresques. Le papier peint panoramique devient donc une sorte de trompe-l'œil suggérant des fresques.

Peindre, pour André Leclerc, c'est la vie. Il ne peut pas s'imaginer de passer ses jours sans sa peinture. Lorsqu'il ne réalise pas un trompe-l'œil ou un papier peint panoramique pour un de ses clients à Montpellier ou ailleurs, il consacre son temps à ses tableaux. Parfois, il copie aussi les anciennes maîtres de la peinture. L'artiste peintre est conscient que beaucoup de ses collègues pensent que copier les œuvres des autres contredirait à leur honneur. Or, André Leclerc n'est pas de cet avis. Selon lui, la création personnelle d'un peintre est souvent entravée par un manque de technique. La liberté de la peinture, quelque soit le style, ne pourrait se développer qu'au moment où un artiste maîtriserait les techniques. "Et pour apprendre la technique", dit-il, "il n'y a pas de meilleur professeur que les grands peintres qui ont 'écrit' l'histoire de la peinture."
Photos et texte : copyright Doris Kneller

vendredi 1 avril 2011

Montpellier, George Frêche et l'Odysseum

L'Odysseum et le testament de George Frêche

George Frêche et l'OdysseumOn a cru tout savoir sur George Frêche et le testament culturel et politique qu'il a laissé aux Montpelliérains. Toutefois, pas plus tôt que cette semaine-ci, une grande nouvelle arrive encore à étonner la ville de l'homme qui, pendant toute sa vie, a aimé "choquer".

Peu importe où l'on se promène à Montpellier, l'œil a du mal à se fixer sur une pierre qui ne semble pas porter le nom de George Frêche marqué en "lettres rouges" : c'est grâce à lui que les quartiers du centre ville ont été aménagés, puis l'Esplanade, le Polygone, l'Antigone... tous des témoins de l'esprit entrepreneur de l'ancien maire de Montpellier. Lorsqu'il a définitivement quitté sa ville et l'agglomération dont il était l'artisan, il avait encore beaucoup de projets en tête qui, partiellement, ont été réalisés après sa mort ou sont toujours en stade de réalisation : la nouvelle mairie ou les ZAT, les Zones Artistiques Temporaires n'en sont que quelques exemples.

Son dernier bébé, toutefois, a été l'Odysseum - et certains disent que cette dernière œuvre faisait partie des créations qu'il aimait le plus. Ce quartier sur la rive gauche du Lez lui tenait à cœur depuis longtemps. Mais avant d'en faire un centre commercial, George Frêche le voulait un champ de loisir. Le premier grand lieu de l'amusement était le cinéma multiplexe Gaumont. Il a été inauguré le 1er avril 1998 - nous fêtons donc aujourd'hui son treizième anniversaire. Loin d'être un "poisson d'avril", il est vite devenu un des premiers cinémas de Montpellier - bien qu'il a "laissé vivre" les salles du centre ville comme le Diagonal, le Royal ou l'Utopia dans le quartier des étudiants.

L'Odysseum, oeuvre de George FrêcheAprès le Gaumont, le tour était à la patinoire Végapolis qui était fonctionnelle ponctuellement pour les vacances de Noël en 2000 - pour George Frêche et plein d'autres Montpelliérains une sorte de marque du nouveau millénaire. Jusqu'à ce que, finalement, le 26 janvier 2002, le planétarium Galilée a ouvert ses portes.

Pour Montpellier, le grand cinéma, la patinoire, le planétarium - tout cela semblait déjà immense. Mais pour George Frêche, ce n'a été qu'un début. En décembre 2007, la zone ludique entre le cinéma et la patinoire a été élargie jusqu'à toucher l'aquarium Mare Nostrum. Et puis, tout a avancé très vite : déjà en 2008, l'Odysseum était connu pour deux autres attractions - le plus grand bowling de France, Bowling Star, et la plus grande surface d'escalade. Comme si souvent, les créations de George Frêche avaient battu les recordes....

Lorsque, en 2009, le centre commercial de l'Odysseum a été inauguré - avec 130.000 mètres carrés - l'œuvre de George Frêche n'était toujours pas accomplie. Pendant un moment, on a même discuté d'une statue de Lénine de quelque 4,50 mètres de haut.

Oui, George Frêche aimait surprendre le monde qui, s'il voulait ou non, l'a toujours observé. Toutefois, le jour de sa mort, les Montpelliérains ont pensé qu'il n'y aurait plus de surprises. Mais non, ils se sont trompés.

Ainsi, une partie étonnante de son testament - ou peut-être pas si étonnante que cela - a été dévoilée très récemment : George Frêche souhaite que l'Odysseum reste le quartier de loisir et de commerce le plus grand de son agglomération. Pour toujours. Aucun autre quartier comparable à Montpellier et aux alentours doit jamais dépasser les 129.999 mètres carrés.

Ce qui, à première vue, semble choquant - donc bien à la hauteur de l'ancien maire et président d'agglomération - n'est pourtant pas nouveau. Il y avait déjà un homme, un roi, avant George Frêche qui a exigé des Montpelliérains de garder pour lui un superlatif. Et, fidèles à la parole qui leur a été demandée, les habitants de Montpellier s'y sont toujours tenus... toujours depuis le 17e siècle.

Lorsque Louis XIV a fait ériger dans les jardins du Peyrou sa statue haute de six mètres, il savait très bien, pour quelle raison il avait choisi cet endroit : le Peyrou est la colline la plus élevée de Montpellier. Si, par conséquent, on compte la hauteur du sol, le socle et les six mètres de la statue, on se rend compte que la pointe de l'épée du roi est placée plus haut que tout toit de bâtiment montpelliérain. Seule la tour de l'église Sainte Anne s'y approche - mais elle reste légèrement en dessous de la pointe de l'épée.

Louis XIV au PeyrouIl est vrai que Louis XIV n'a jamais pu voir sa statue - elle n'a été terminée que trois ans après sa mort - tout comme George Frêche ne verra pas la finition de son dernière œuvre appelée Odysseum. Or, les Montpelliérains ont sagement suivi le désir de Louis XIV, sa pointe d'épée dépasse toujours tous les bâtiments de la ville.

Si, dans trois cents ans, les Montpelliérains vont toujours respecter le désir de George Frêche et faire en sorte que son œuvre reste le plus grand de son genre, nul ne le sait. Mais, de toute manière, la statue de Louis XIV a prouvé que les habitants de Montpellier savent respecter les testaments de leurs souverains...
Photos et texte : copyright Doris Kneller