mercredi 28 juillet 2010

Voix de la Méditerranée - Lodève, Montpellier et les pays du Midi

Les voisins de Montpellier : Le treizième festival de poésie à Lodève

Voix de la MéditerranéePour la treizième fois, les amateurs de la poésie de Montpellier ont quitté leur ville - pour un jour, pour un week-end, pour une semaine... Leur but : Lodève et son festival de poésie, la Voix de la Méditerranée.

Lodève en été est devenu synonyme de culture : le musée Fleury avec ses expositions et sa collection permanente qui fait une "concurrence" plaisante au musée Fabre de Montpellier - ou, plutôt, qui sert à augmenter le plaisir des amateurs de la peinture qui circulent entre Montpellier et Lodève - et, bien sûr, la Voix de la Méditerranée, le festival de poésie. Il s'agit d'une poésie que, en France, seul "l'expert" arrive à s'en procurer, celui qui cherche "vraiment" et sait ce qu'il cherche. Le grand public, par contre, ne "tombe" pratiquement jamais sur cette poésie pourtant si forte, composée par des auteurs situés dans les pays autour de la Méditerranée - sauf au mois de juillet, à Lodève.

Déjà les lieux sont d'une telle originalité - et d'une telle beauté - que, déjà pour en profiter, on a envie d'assister aux moments de la poésie récitée par les auteurs eux-mêmes, traduite, au besoin, en français. Il y a, par exemple, les "lectures les pieds dans l'eau" ou les manifestations poétiques sur "fauteuils flottants", où le public est installé sur des chaises placées au milieu de la Soulondre et baigne, littéralement, ses pieds dans l'eau.

Mahmut Demir et Alain DésirMais ceux qui préfèrent la lecture plus "sèche" peuvent se bercer dans des hamacs ou se détendre dans des chaises longues tandis que leur esprit s'envole avec la poésie accompagnée, parfois, par la musique de la nature qui entoure la ville de Lodève. Le vent augmente le sentiment de s'échapper du quotidien pour entrer dans un monde de rêve, et les rouges-gorges joignent leurs voix à celles de la Méditerranée.

D'autres lectures ont lieu dans des cours cachées derrière des maisons, où le public écoute la poésie sous l'ombre de grands arbres, entouré de fleurs, qui donnent le sentiment de ne pas être en ville, mais quelque part dans la nature. On peut aussi s'installer sur des places de la ville, par exemple dans l'ombre de la cathédrale, et déguster des produits naturels pendant qu'on écoute. Et personne ne pourrait dire qui est le "meilleur" poète : ils ont tous un point en commun - l'immense talent. L'amateur de la poésie, bien que chacun ait son goût et ses styles préférés, trouve son compte, peu importe la manifestation qu'il choisit.

Si l'on parle de "goût" : il y en a pour tous les goûts poétiques. Celui qui, par exemple, a écouté la voix chaleureuse de Wael Abdel Fattah de Caire, scientifique et poète qui, avec son sourire timide et ses poèmes mélancoliques et, en même temps, pleins d'espoir enlève le public dans un univers de poésie qui flotte au-dessus de la Méditerranée, était étonné d'être confronté par la suite à la voix de Claude Favre. Claude est une poétesse française dont le public entendra encore parler : ses poèmes sont réalistes, parfois brutales dans leur vérité. Leur langage simple et, parallèlement, de grande force secoue l'auditeur et ne lui permet plus de fuir la vérité et continuer à faire le "sourd" face au monde qui l'entoure.

Toutefois, qui dit poésie dit aussi musique. Alain Désir était un des musiciens qui, avec sa guitare et la percussion, a accompagné des voix de poètes. Son jeu tout seul était suffisant pour enchanter le public : il présente un accompagnement sensible qui monte et descend avec les mouvements des sentiments exprimés par les poètes, mais sa musique vit aussi toute seule, s'adaptant à la beauté et à la gaieté du lieu. Quand il joue, Alain Désir sourit souvent. Le public sent que la musique l'enchante, et son propre enchantement se communique à sa musique et, par elle, au public.

Agnès Tuvache, chanteuseUn genre de musique qui, avant tout, étonne l'auditeur est présenté par Agnès Tuvache, une chanteuse à la voix indescriptible. Après l'étonnement, toutefois, vient l'enchantement. Agnès Tuvache maîtrise les hauteurs et descend dans les gammes les plus basses avec une légèreté qui laisse le public littéralement bouche bée. Dans la vie quotidienne, Agnès Tuvache utilise ses talents dans le secteur de la psychologie et psychothérapie. Mais pendant le festival, sa voix dominait celles des poètes et exprimait tous ces sentiments forts que le public n'osait pas s'avouer.

Le soir était le moment des spectacles musicaux. Comme tous les ans, l'équipe de la "Voix de la Méditerranée" présentait des chanteurs et musiciens connus et moins connus, mais tous choisis pour leur talent et leur originalité. Toutefois, la nuit était aussi le cadre pour des spectacles moins "voyants", conçus, surtout, pour faire plaisir. Un de ces artistes brillants dans la nuit était Noredine Mézouar.

Le chanteur-musicien-poète fait rêver les adultes et fascine les enfants avec des contes traditionnels et personnels. Pour quelques heures, il amène son public dans un monde d'hommes qui se croient sages, de femmes qui règnent dans l'ombre de leur foyer, de pauvres qui sont riches et de gens simples qui ne connaissent pas leur propre sagesse. Un monde de conte de fée où la philosophie est roi, irréel et réel en même temps. Et lorsque le corbeau d'un des récits de Noredine Mézouar comprend que les "petites choses" de la vie sont si importantes qu'il ne vaut pas la peine de poursuivre les "grandes", et lorsque le public rit et devient sérieux sans avoir l'impression d'être soumis à des sentiments contradictoires, le visiteur de la Voix de la Méditerranée sait qu'il n'oubliera pas de sitôt sa journée à Lodève.
Photos et texte : copyright Doris Kneller

lundi 19 juillet 2010

Été à Montpellier : fêtes et vacances

Montpellier, la ville où été rime avec fête et vacances

Vacances et fête à MontpellierÀ Montpellier, été rime avec fête. Pas une soirée où les Montpelliérains et leurs visiteurs ne profitent pas de l'ambiance chaleureuse et de l'esprit festif qui règne sur la ville à côté de la Méditerranée. Et il y en a pour tous les goûts : les Estivales, tous les vendredis sur l'Esplanade, avec leur offre de spécialités du pays, leur musique, leur petit marché artisanal et la communication facile entre des gens qui ne se sont jamais rencontrés mais pour qui la soirée sera peut-être le début d'une véritable amitié. Les cracheurs de feu, les acrobates, les chanteurs dans les rues et sur la place de la Comédie - et la culture "officielle" : musique, film, exposition, des arts qui sont à l'honneur au cours de l'été montpelliérain.

Mais avant tout, dans cette première moitié des vacances à Montpellier, il y a le festival Radio France. De la musique, surtout, mais aussi des films sur des époques musicales et des grands hommes et femmes de l'histoire de la musique. Pendant deux semaines, ces films sont projetés gratuitement au Corum. Et, bien sûr, les Rencontres de Pétrarque, partie incontournable du festival Radio France, où on fait la philosophie de haut niveau, pourtant compréhensible pour tous, pendant une semaine à partir du 19 juillet. Cette année-ci, les philosophes venus à Montpellier se posent la question, en qui on peut avoir confiance...

Festival Radio France au CorumToutefois, dans cette ville estivale, les cinéphiles ne peuvent pas se plaindre non plus. Début août commence le "Cinéma sous les étoiles", avec des films devant la médiathèque Émile Zola, sur la Place Dionysos - douze séances et toutes gratuites. Cette année-ci, c'est l'Amérique qui sera dans le point de mire du cinéma, comme déjà pour la Comédie du livre. Jumellage avec Louisville oblige...

La gratuité est d'ailleurs un trait important de la culture montpelliéraine, et cela non seulement en été. Montpellier a pour principe de mettre la culture à la portée de tout le monde. Pour ceux qui habite la ville, le fait d'être "Smicard" ou sous le régime du RSA n'est pas une excuse pour s'éloigner de l'art et de la culture : entrée libre au musée Fabre et gratuité des médiathèques pour les étudiants et autres personnes sans revenu, entrée libre au musée un dimanche par mois pour tout le monde, des séances gratuites pendant pratiquement tous les festivals, des entrées au prix très bas aux manifestations payantes pour les personnes sous régime RSA, la gratuité totale des soirées de discussion et de conférence dans le musée Fabre ou la salle Rabelais où, au cours de la dernière année, la science et son Agora des Savoirs ont joué un rôle imbattable, des cafés à thèmes comme, par exemple, le café philo ou le café des sciences,...

Hélène Mandroux au Pavillon PopulaireMais aussi l'art de la photo trouve sa place à Montpellier. Le maire Hélène Mandroux vient d'inaugurer la nouvelle exposition photo au Pavillon Populaire sur l'Esplanade. Et de nouveau, l'Amérique est à l'honneur : "Un rêve américain" est le titre de l'exposition qui présente des photos d'une qualité artistique extraordinaire - mais peu étonnante, vu que les fidèles des expositions au Pavillon Populaire ont pris l'habitude d'une très haute qualité.

La qualité, toutefois, est aussi le "standard ordinaire" de l'art qui est produit dans les rues de Montpellier. Les soirées d'été, la ville est pleine de musique, et le promeneur quitte le "territoire" d'un chanteur et guitariste pour immédiatement entrer dans celui d'un groupe de Jazz, de musique indienne d'Amérique ou d'un autre chanteur. Un grand cercle d'admirateurs sur la place de la Comédie indique des danseur du feu, un troupe de hip-hop ou de breakdance - et il est difficile à dire qui est le meilleur...
Photos et texte : copyright Doris Kneller

mercredi 14 juillet 2010

Montpellier sportif : le Footbag ou "Hacky Sack" à Montpellier

Le "Hacky Sack" de Montpellier - Championnat de France de Footbag sur la place de la Comédie

Footbag à MontpellierMontpellier, ceci est connu, est une ville ouverte à toute nouvelle expérience. Ceci se reflète dans son université, son esprit international, ses fêtes et ses manifestations culturelles. Mais, depuis quelque temps, ce goût de l'ouverture concerne aussi le sport.

Ainsi, après déjà avoir accueilli le championnat de France de Beach-Volley, Montpellier est devenu la ville qui héberge le championnat de France de Footbag ou, comme disent les Américains, du Hacky Sack, du "sac à botter".

Et personne n'est étonné de voir des prestations d'une qualité supérieure : le championnat à Montpellier réunit des joueurs classés parmi les vingt meilleurs Footbaggers du monde. Lorsque, sur la place de la Comédie à Montpellier, on observe alors ces athlètes du petit ballon, on a l'impression de voir plutôt des danseurs que des sportifs. Avec des mouvements élégants, les joueurs jonglent avec le ballon ou, plutôt, avec un petit sac, avec le but principal de ne pas le laisser tomber. Mais ils n'ont pas le droit de le toucher avec des mains - seuls les pieds et les mollets jusqu'aux genoux sont dans le jeu.

Championnat français du FootbagLe spectacle le plus beau est livré par les Footbaggers qui exercent le Freestyle, le style libre. Ils jonglent le ballon sur leur pied, et on a l'impression qu'ils suivent ses mouvements avec le corps entier. Parfois, il semblent "planer" au-dessus du sol de la Comédie, et la légèreté de leurs sauts rappelle plutôt les figurines d'un ballet classique qu'une compétition au petit ballon. Ce Freestyle du Footbag est exercé par une seule personne à la fois qui doit éviter que le sac tombe par terre.

Mais les joueurs du Footbag présentent aux Montpelliérains encore une autre compétition, le Net. Au contraire du Freestyle où le Footbagger est seul avec le ballon, le Net se joue à deux ou quatre, en simple ou en double, qui sont séparés - comme dit le mot - par un filet haut de 1,55 mètres. De nouveau, la règle veut que le ballon ne touche pas terre, mais, en même temps, il doit être lancé sur le filet.

Au contraire d'autres sports du ballon où le point de mire est la prestation physique, ce qui compte dans le Footbag est, surtout, la dextérité et la beauté du mouvement. Mais non seulement la danse des joueurs, mais aussi le ballon est plutôt spécial. Il n'a rien en commun avec les ballons "classiques", et on parle plutôt d'un sac - d'un bag en anglais - que d'un ballon. Il est fabriqué en tissu ou, parfois, en cuir, son diamètre ne dépasse pas les cinq centimètres et il pèse quarante grammes. Le plus original, toutefois, n'est pas sa forme mais son contenu. Il n'est pas rempli d'air, comme les ballons généralement utilisés dans le sport, mais de billes en plastique ou en plomb. À l'origine, cependant, on se servait de sable ou de riz...

Hacky Sack ou Footbag à Montpellier...ce qui ne veut pas dire que le Footbag viendrait de l'Asie. Parce qu'encore avant qu'on se serve du riz pour remplir le hack sack, le ballon du footbag, on a choisi des fèves, nourriture populaire du sud des États Unis. On peut dire que ce consommateur de fèves, un homme de Texas, John Stahlberger, a inventé ou, plutôt, perfectionné ce nouveau jeu de ballon par pur ennui. Sportif plus ou moins professionnel, il s'était blessé au genou, et cet handicap l'obligeait à prendre des vacances. Il les passe en Oregon où il tombe sur un sport local, frapper des pieds un sac de fèves avec le but qu'il reste dans l'air le plus longtemps possible. Et, miracle : John Stahlberger découvre que ce petit jeu ne fait pas seulement plaisir, il fait aussi du bien à son genou blessé.

Il commence alors à transformer le jeu en "art sportif". Il décide que seuls les pieds, les mollets et les genoux doivent toucher le sac, et il se met à tester et à dessiner les figurines qui donnent le plus d'équilibre au petit ballon. Il découvre aussi que le riz ou, finalement, des billes en plastiques ou en plomb offrent plus de stabilité au mouvement que les fèves.

Six ans après sa découverte hasardeuse, en 1978, John Stahlberger fait de la prestation individuelle un jeu d'équipe : il invente la version "Net", où le ballon ne doit pas seulement rester dans l'air, il faut aussi le pousser dans le camp adversaire. Mais au contraire du Freestyle où les mollets et les genoux jouent en rôle dans l'équilibre du ballon, les joueurs manipulent le sac exclusivement avec les pieds.

Cette idée du jeu d'équipe a aidé le Footbag à percer comme "véritable" sport qui, entre-temps, a atteint une réputation internationale.

Au cours des années, d'autres formes que le Freestyle ou le Net ont été ajoutées à la famille des jeux avec le hacky sack, mais l'Association Française de Footbag n'accepte que ces deux versions.
Photos et texte : copyright Doris Kneller

samedi 10 juillet 2010

Entraide dans les rues de Montpellier

Micro-trottoir : les Montpelliérains refusent-ils l'aide aux victimes de petits accidents dans la rue ?

Montpellier, micro-trottoirStation de bus près de la gare de Montpellier, un matin en semaine. Des dizaines de Montpelliérains attendent leurs bus. Une dame d'une cinquantaine d'années glisse, elle tombe. Elle n'est pas blessée, mais, troublée par sa chute, elle ne se lève pas immédiatement. Quelques-unes des personnes autour d'elle la regardent, certaines avec curiosité, d'autres juste ennuyées par l'attente de leur bus. Mais personne ne bouge.

"Finalement", raconte la dame à l'équipe des Gens de Montpellier, une vieille dame s'est adressée à moi, au moment où je m'étais déjà levée. Elle s'est fâchée à cause des gens autour de nous dont personne ne jugeait nécessaire de s'occuper de moi."

Une autre dame, dans la quarantaine, est toujours bouleversée par ce qui lui est arrivée il n'y a pas longtemps. Le scénario : également une station de bus au centre de Montpellier, également un matin en semaine. "J'ai regardé le plan des bus", se souvient-elle, "et je n'ai pas fait attention à ce qui se passait autour de moi." Tout à coup, elle reçoit un coup de pied très fort dans la cheville. Surprise, prise de douleur, elle crie très fort : "Aïe !!" - "C'était un garçon. Il n'avait pas fait attention. C'était un accident, bien sûr." Elle hésite, puis elle continue : "Quel âge avait le garçon ? Huit ans, peut-être. - Il était avec son père qui s'occupait plutôt de son chien que de son enfant. J'avais très mal, je ne pouvais plus poser le pied par terre." Elle aurait attendu que le père de l'enfant s'occupe d'elle, lui demande peut-être s'il pouvait l'aider ou, au moins, qu'il exprime son regret. Mais non : "Il m'a engueulé. Je n'aurais pas le droit de crier à côté de son enfant. Sous le choque et la douleur, j'ai commencé à pleurer. Il m'a donc traitée de folle."

Montpellier Saint-RochUne exception ? Un homme peut-être tracassé par des problèmes qui ne lui permettaient pas de réagir correctement ? - "Il y avait pire. On n'était pas seuls. Immédiatement à côtés de nous, il y avait deux femmes qui avaient tout vu. Et un peu plus loin, il y avait une dizaine de personnes qui observaient la scène." Mais personne n'a bougé. "Je me suis adressée aux deux femmes pour leur demander de l'aide. Ma cheville faisait si mal, je ne pouvais plus marcher. Mais elles ont fait comme si elles ne m'entendaient pas." - Des étrangères peut-être qui n'auraient pas compris ? - "Non, parce que j'ai entendu qu'elle parlaient français entre elles."

L'entraide, l'aide des personnes en détresse, l'aide spontanée dans la rue, cela n'existe-t-il plus à Montpellier ? - "Aujourd'hui, les gens n'aident plus personne", commente un jeune homme interrogé par l'équipe des Gens de Montpellier. "Ici, ça va encore. Mais regardez Paris - là, les gens se font agresser dans le métro, et personne n'ose intervenir."

"Les gens ont peur", constate une dame d'une trentaine d'années. "Il y a trop d'agressions. Quand quelqu'un est agressé, ils ont peur que l'agresseur se prend à eux. Ils préfèrent s'éloigner que prendre un risque."

Les paroles de la dame semblent logiques. Or, dans le cas de la dame tombée ou de la dame verbalement agressée par un père mal éduqué, il n'y avait pas de danger pour de tierces personnes.

"Ce n'est pas une peur concrète. C'est juste un sentiment vague de surtout pas se mêler de ce que ne nous regarde pas", explique une autre dame d'à peu près le même âge. "La société va mal, tout le monde est effrayé : par la presse qui raconte que même le fils des voisins peut être dangereux, par la situation économique, par l'insécurité extérieure. Par conséquent, on préfère que le mal frappe les autres et qu'il ne nous contamine pas."

Le mal est-il contagieux ? Doit-on craindre d'être frappé par le "mauvais œil", si on aide une femme à se lever ou si on s'occupe de la victime d'un accident ? - "Si j'aidais une femme tombée dans la rue ? Bien sûr." Le jeune homme a l'air vexé. "Cela va de soi, n'est-ce pas ?" Il n'est pas le seul à être choqué par la question. Une vingtaine de Montpelliérains de tout âge réagissent plus ou moins comme lui : "Vous n'avez pas de question plus intelligente ?", se fâche une femme d'une soixantaine d'années. "Tout le monde aiderait une femme tombée dans la rue. C'est bien normal."

L'image change avec une autre question : "Avez-vous déjà eu besoin d'aide dans les rues de Montpellier ?" - "Oui", répond spontanément une dame dans la trentaine. "J'étais enceinte. Et un jour, j'avais un malaise et, faute d'autre possibilité, je me suis assise sur les marches d'une maison. C'était en hiver, il faisait froid. Tout le monde pouvait voir que j'étais malade. J'étais tout blanche, et j'ai lutté pour ne pas vomir."

Flamma de la PaixUne femme enceinte assise par terre sur les marches d'une maison, en hiver, dans une rue très fréquentée - certainement pas un spectacle très courant : "Les gens m'ont regardé comme s'ils me tenaient pour une folle. Mais personne s'est approchée pour demander si tout allait bien." Dix minutes plus tard, elle se sentait un peu mieux, mais toujours incapable de se lever. "J'ai appelé ma copine pour qu'elle vienne me chercher. Les gens dans la rue n'aident jamais personne."

Un Monsieur d'une quarantaine d'années raconte une histoire similaire : "Ma mère était tombée dans la rue. Elle était blessée et ne pouvait plus se lever. Cela a duré plus de dix minutes !!! jusqu'à ce que se trouve quelqu'un qui appelle une ambulance. Les autres l'ont contournée comme si elle était un obstacle dans la rue. Elle avait l'impression d'être prise pour une ivrogne."

Histoires de malchance, des exceptions dans une ville chaleureuse ? Ou reflets d'une ville dont les habitants ne s'occupent plus de ce qui se passent autour d'eux ? Les Montpelliérains sont-il toujours prêts à aider les victimes d'une malaise ou d'un accident dans les rues ? - Affaire à suivre…

Photos et texte : copyright Doris Kneller

lundi 5 juillet 2010

Agressions à Montpellier : les Montpelliérains, ont-ils besoin d'avoir peur ?

Criminalité à Montpellier : racisme, agression et peur

Justice à Montpellier"Les gens ont peur", avait déclaré une jeune femme lors des interviews faits par l'équipe des "Gens de Montpellier" le lendemain de l'apéro géant de Facebook. "Quand quelqu'un à côté d'eux a un problème, ils préfèrent regarder ailleurs." - Et elle raconte une expérience récente où, sur le quai du tram, en pleine journée, elle a été agressée - et personne n'a réagi.

Était-ce un incident isolé ? Où la jeune femme a-t-elle raison lorsqu'elle dit que les gens ont trop peur pour aider la personne à côté d'eux ? La ville de Montpellier est-elle devenue un endroit où les gens ont peur les uns des autres ?

"Vous avez deux possibilités", répond une dame dans la cinquantaine. "Vous pouvez rester chez vous, ne rien faire, surtout le soir. Comme ça, vous êtes tranquille, personne ne peut vous agresser. La deuxième possibilité : oublier toutes ces bêtises. Il est vrai qu'il y a des gens qui sont agressés. Mais c'est rare - c'est-à-dire qu'il y en a qui provoquent leur sort, par exemple par un comportement provoquant. En général, les jeunes ont autre chose à faire que s'attaquer à une vieille femme..."

Montpellier la nuit : la ComédieUn jeune homme voit la question sous un angle différent. "Quand quelqu'un est agressé et ils ne savent pas par qui, ils disent que c'était des Maghrebins. S'ils savent que c'était des Maghrebins, ils parlent des 'agresseurs maghrebins'. Mais s'ils savent que c'était des Français, ils parlent des agresseurs tout court - ils ne disent jamais des 'agresseurs français'".

La peur a-t-elle donc un fond raciste ? - "Certainement", constate une jeune femme qui, comme elle dit en rigolant, est "bien française malgré mes cheveux foncés". Il serait vrai que, souvent, on pense automatiquement aux jeunes Maghrebins lorsqu'on parle d'agressions. "La plupart des jeunes Maghrebins sont comme les jeunes Français : ils veulent s'amuser, gagner leur vie, avoir un avenir. La seule différence est que les jeunes Maghrebins ont encore moins d'avenir que les Français. La nuit, dans les rues, les jeunes, maghrebins ou français, font beaucoup de bruit, surtout dans certaines rues du centre de Montpellier, par exemple dans la rue de Verdun. Ce bruit est peut-être désagréable pour ceux qui veulent dormir - mais c'est un autre problème qui n'a rien à voir avec des agressions."

Certainement. Cependant, tout cela ne répond pas à la question s'il faut avoir peur dans les rues de Montpellier. "Si je connais quelqu'un qui a été agressé ?" La dame dans la trentaine réfléchit. "On en parle parfois à la radio... Mais, hm, franchement, non, parmi mes connaissances, il n'y a personne..."

Les jeunes de Montpellier : Place Jean JaurèsCette réponse se répète plusieurs fois - tout le monde "sait" qu'il y a des agressions dans les rues de Montpellier, mais personne parmi les interrogés ne connaît des gens concernés. Seule une jeune Anglaise ("Je suis à la fac, je fais des études d'économie.") a une autre réponse : "Oui, j'ai été agressée. Très souvent." Et elle explique : "Surtout le soir, parfois aussi pendant la journée, il y a des groupes de jeunes partout dans la ville. Ils bloquent les trottoirs. Et il est très difficile de passer. Souvent, quand on essaie de passer, il nous disent des choses." - Des choses ? - "'Arrêtez, Mademoiselle' ou 'restez avec moi' ou 'prenez un café avec moi' ou 'vous êtes très jolie'. Ça se fait pas. On ne parle pas comme ça à une femme, ça me fait très peur. Je baisse la tête pour ne regarder personne et j'essaie de passer le plus rapidement possible."

Ces gens-là les ont-ils jamais touchée ? - "Non, jusqu'à maintenant, pas. Mais ils me font peur."

Finalement, l'équipe des "Gens de Montpellier" tombe sur des récits plus graves. "Ils ont jeté par terre ma collègue. Elle en est sortie avec un bras cassé", raconte une dame autour de la cinquantaine et une autre, plus jeune, explique qu'une soirée, une voiture s'était arrêtée à côté d'elle, deux hommes en seraient sortie, l'auraient menacée et pris son sac. - Des Maghrebins ? - "Non, ils avaient l'air français."

Ceci signifie-t-il qu'il faut avoir peur à Montpellier ? "Je pense que, de nos jours, on n'est jamais vraiment sûr", constate une dame dans la quarantaine. "Mais le taux de criminalité n'est pas très élevé à Montpellier - nous pouvons donc être contents. Il y a des gens agressifs - mais peu d'agressions, par rapport à d'autres villes."

Photos et texte : copyright Doris Kneller