dimanche 4 septembre 2011

Trams et bus : Montpellier se révolte

Rue Durand, rue Levat, rue Pagezy et rue de la République : la révolte du quartier de la gare

Rue Pagezy à MontpellierDébut septembre, 9.30 heures, au centre de Montpellier. Trois piétons s'arrêtent au coin de la rue Pagezy et de la rue de la République. Ils se regardent, ils hochent la tête. Normalement, ils ne se seraient même pas remarqués, mais la situation les unit. "C'est toujours pareil", dit l'un et "On en a assez", remarque l'autre.

Ce qui les dérange, c'est les trois bus qui, venant de la rue Pagezy, tournent dans la rue de la République, les roues sur la voie, les "queues" des bus au-dessus du trottoir, de la manière que les trois piétons sont obligés de se plaquer contre le mur pour ne pas se faire écraser. "Si on est piéton à Montpellier", conclut un des trois lorsqu'ils peuvent enfin bouger, "on ne compte pas."

Toutefois, la colère ne monte pas seulement chez les piétons, mais chez la plupart des habitants du quartier de la gare. Ils se sentent abandonnés avec leurs problèmes, leur cadre de vie devient de plus en plus désagréable. "On se moque de nous", disent les uns, ou : "Les habitants de Montpellier n'ont rien à dire. C'est la mairie qui décide, pas pour les Montpelliérains, mais contre eux."

Ce qui exaspère les habitants du centre de Montpellier, ce n'est pas forcément les travaux pour la ligne 3 du tram - mais les résultats. Ils ont accepté que, pendant quelques années, ils seraient gênés par le bruit et les problèmes de circulation. "On nous a prévenus des perturbations passagères", se rappelle un des révoltés de la rue Durand. "Mais personne ne nous a dit que ces perturbations seront permanentes."

Rue de la République à MontpellierEntre-temps, la révolte des habitants de la rue Durand s'est étendue aux deux rues parallèles, la rue Levat et la rue de la République. Sur les portes et vitrines de la rue de la République, un tract appelle au rassemblement. "... groupons-nous", peut-on y lire, "constituons un comité de quartier et opposons-nous pour que la rue de la République ne devienne pas la Rue de tous les bus que personne ne veut."

En effet, avec les travaux sur la ligne 3 du tram, les bus autour de la gare sont devenus un véritable tracas. D'abord, les décideurs de la TaM les ont fait passer par la rue Durand : avec le résultat qu'aucun enfant ne pouvait plus s'y aventurer, que les commerçants commençaient sérieusement à souffrir du manque de clientèle - personne n'avait plus envie d'y passer -, on avait peur des accidents, le bruit était insupportable, et l'air était pollué au point d'être irrespirable. Les habitants se sont donc révoltés... avec un certain succès.

Ce succès, pourtant, a amené les bus à la rue parallèle, la rue Levat - qui, immédiatement, s'est révoltée elle aussi. Pour que les bus ne soient pas envoyé d'une petite rue à l'autre, l'association de la rue Durand a fait des propositions : lier les bus avec d'autres stations de tram - "la gare aura ses trois lignes de tram, c'est suffisant" - et les faire passer par les grands axes autour du quartier de la gare.

Les autorités, toutefois, font la sourde oreille. "Ils n'ont pas envie de nous respecter", se plaint une dame qui vit dans la rue Levat, "et de respecter le caractère des vieilles petites rues. Ils auraient facilement pu mettre les bus ailleurs. Mais au lieu de ça, ils font souffrir les habitants de toutes les trois rues. Il n'y a plus de qualité de vie.

Il est vrai qu'en résultat de la révolte, il y a moins de bus qui fréquentent la rue Durand - la rue Levat et la rue de la République se partagent les autres. "Mais la révolte nous a coûté cher", constate un habitant de la rue Durand. "On a un peu moins de bus, mais ceux qui restent font assez de bruit et polluent l'air dans nos appartements. Et notre 'punition' : ils nous ont volé tous les parkings."

Quelle ville ne rêverait pas d'un centre sans voitures ? Toutefois, Montpellier n'y est pas encore. Pour le moment, c'est juste les habitants du quartier de la gare qui ne savent plus où garer les leurs. Ainsi, la rue Durand a reçu un joli trottoir très large - "pour faire taire les voix qui disent que les piétons ne peuvent plus y passer" - et un couloir étroit pour les bus et les voitures. Voilà tout. Si un habitant de la rue a besoin de s'arrêter près de sa maison pour, par exemple, décharger ses bagages des vacances, il provoque immédiatement un embouteillage et la colère des conducteurs des bus. "La rue Durand est condamnée à mourir", explique une habitante, "car personne ne peut plus emménager. Les camions de déménagement n'ont plus de place." - Le déménagement, pourtant, n'est plus possible non plus.

La situation de la rue Pagezy n'est pas différente : un trottoir assez large, un petit couloir de bus - et plus aucun parking. La rue de la République est partagée entre le tram, un petit couloir de bus - et, pareil, plus aucun parking. "Ils veulent qu'on prenne des abonnements dans les parkings officiels, mais pour la plupart des gens, ils sont trop chers." Pire : "Pour avoir un abonnement dans le parking Laissac, vous devez attendre qu'une place se libère. On vous met sur une liste d'attente, voilà tout."

Aujourd'hui, quand on passe par la rue Durand, on ne voit qu'un grand chantier. On y tombe sur un arrêt de la ville de Montpellier, signé par Madame le Maire Hélène Mandroux, qui interdit toute circulation et, bien sur, aussi le stationnement dans la rue entre le 30 juin et le 30 septembre. La société Eurovia, chargée des travaux, toutefois, n'est pas d'accord avec l'arrêt de la mairie. Sur leur communication, on peut lire que l'interdiction de circulation concerne la période entre le 8 août et le 31 octobre.

"Vous voyez", est le commentaire d'un habitant, "ils se moquent de nous. Ils ne font même pas l'effort de se mettre d'accord. Mais, de toute manière, peu importe si les travaux se terminent le 30 septembre ou le 31 octobre, ça ne vaut pas la peine de nous raconter que le stationnement est interdit d'ici là : tout le monde peut voir qu'il n'aura plus de place pour garer les voitures, après les travaux." Il rigole amèrement. "Peut-être, ils n'auront plus besoin d'interdire le stationnement après le 31 octobre - parce qu'il n'y aura plus de places pour stationner."

Du côté de la rue de la République, on constate que même le bruit des travaux ne sera pas terminé de sitôt. "Savez-vous qu'il vient d'être voté que la ligne de bus n° 7 doit redescendre sur les rails du Tram en direction de la gare", peut on lire dans l'appel de ses habitants, "et que des travaux vont être repris ?"

Le parc dans la rue de la République, MontpellierRien n'est définitif, alors, et rien n'est terminé. En attendant, le bruit, la pollution et la peur des accidents continuent à hanter les habitants du quartier de la gare. "Et même nos chiens n'ont plus de place", ajoute une dame en indiquant la fermeture du petit parc de la rue de la République qui, officieusement, était devenu le "terrain des chiens". Le parc existe toujours, mais ses arbres se cachent derrière un mur. Et là où, auparavant, se trouvait l'entrée, on peut lire maintenant que "Nos équipes aménagent votre cadre de vie"...
Photos et texte : copyright Doris Kneller


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