lundi 30 mars 2015

Elections départementales à Montpellier : le deuxième tour

Quels sont ces Montpelliérains qui ont préféré s'abstenir aux élections départementales ?


Dans ces jours des élections, il y en a beaucoup qui se demandent qui a voté pour qui et, surtout, qui a voté pour le Front National. Mais il y une autre question à poser, une question concernant pratiquement la moitié de tous les Français qui ont le droit de voter et dont la réponse sculpte le paysage politique plus que tous les bulletins de vote : Pourquoi tant de personnes n’ont-elles pas fait usage de leurs droits civiques ? - Pourquoi n’ont-elles pas voté ?

Face à 45,62 pour cent d’abstention dans l’Hérault, 5,62 pour cent de votes blancs, 2,53 pour cent de votes nuls et, déjà à la base, uniquement 73,58 pour cent d’inscrits (source) l’équipe de Montpellier Presse Online voulait savoir, pour quelle raison tant de Montpelliérains n’ont pas entamé ce dimanche la voie aux urnes. Au début, sa tâche ne semblait pas facile : si beaucoup d’électeurs sont entretemps prêts à confier aux autres leur choix de parti, il n’y en a que peu qui « avouent » avoir manqué à leurs « devoirs de citoyens ». Mais, finalement, Montpellier Presse Online pouvait se baser sur une bonne centaine de réponses sérieuses.

L’argument le plus fréquent était sans doute la lassitude, le « ras-le-bol » de la politique. « La droite utilise les arguments de la gauche », se plainte par exemple un Monsieur d’une cinquantaine d’années, « et la gauche fait une politique de droite. Pour qui voulez-vous qu’on vote ? Autant ne pas y aller… »

« Les Français sont devenus fous », se fâche une dame dans la trentaine. « Ils n’ont absolument rien appris de l’histoire. S’ils veulent le mal, ils l’auront. Moi, je me lave les mains - je ne participe plus, même pas par un vote. »

Toutefois, il n’y a que peu de Montpelliérains qui ont des idées aussi extrêmes que cette dame. « Je ne sais pas pour qui voter », explique une dame dans la quarantaine et exprime l’opinion de beaucoup des personnes interrogées, « et ce n’est certainement pas ma petite voix qui change quoi que ce soit. Pour moi, ils sont tous pareils, à droite, à gauche, ils ne pensent qu’à leur propre portemonnaie. »

Beaucoup de Montpelliérains regrettent aussi que le vote blanc n’est pas pris au sérieux. « J’ai voté blanc », confie une dame un peu plus jeune à l’équipe de Montpellier Presse Online. « Je souhaite que les politiciens comprennent que je ne suis pas d’accord avec eux - avec personne parmi eux. »

Un Monsieur d’une trentaine d’années, par contre, se fâche contre tous ceux qui « ne votent pas, votent blanc ou pour un petit parti qui n’a aucune chance à barrer la route à l’extrême droite et qu’ils n’utilisent que pour pouvoir dire qu’ils auraient voté. » Lui-même, avoue-t-il, n’aurait pas voté non plus : il aurait été obligé de se déplacer à court terme, et il ne connaîtrait personne à qui il aurait pu confier sa procuration. « En politique, je me méfie de tout le monde. Qui me dit que je ne choisis pas quelqu’un qui abuse de ma procuration pour voter pour le FN ? Aujourd’hui, on ne sait plus qui vote pour ce parti. »

« Si je ne vote pas », dit un autre Monsieur d’à peu près le même âge, « c’est que je n’ai plus aucun espoir. Que, au contraire, je souhaite accélérer le désespoir. Vous êtes étonné ? Ne regardez pas seulement la France - le monde entier est dans un état désespéré. Les gens se créent des systèmes de pouvoir avec qui ils sont incapables de vivre. Le résultat : ils vivent mal, sont malheureux, mécontents de leur quotidien. Mais au lieu de changer eux-mêmes, de rectifier leur choix de mode de vie, ils cherchent la solution chez les puissants : parfois à gauche, parfois à droite, sans trouver leur bonheur. Évidemment. En ce moment, c’est de nouveau - comme déjà souvent dans l’histoire - la tendance à droite. Je sais, je sais, si je ne vote pas, je donne indirectement une voix pour l’extrême droite. Mais, de toute manière, nous y arriverons, c’est la loi de l’histoire. Chaque vote contre l’extrême droite ne saurait que ralentir le procès naturel. Autant laisser l’histoire suivre son cours - plus vite l’extrême droite prend le pouvoir, plus vite la catastrophe arrive et, comme le veut l’histoire, plus vite l’horreur passe pour laisser la place à quelques dizaines d’années de moindre mal… »

Mais pas tout le monde n’a des considérations si profondes. « C’était hier qu’il fallait voter ? », demande une dame dans la quarantaine. « Tiens, j’ai oublié. » Et un Monsieur dans la cinquantaine : « J’aurais voté, évidemment, mais c’était l’anniversaire de ma sœur à Nîmes. On est partis trop tôt et rentré trop tard pour voter. » Et une dame dans la cinquantaine : « J’avais l’intention ferme d’aller voter. Mais il faisait froid et je n’avais pas d’autre raison pour sortir. J’ai donc préféré passer la journée bien au chaud dans mon lit. »

Une dame dans la trentaine soupire quand l’équipe de Montpellier Presse Online lui pose la question. « Je vous jure, je voulais voter. Mais je ne pouvais pas, pour des raisons familiales. Et je ne suis certainement pas la seule. Si je pense à cette force politique représentée par tous ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas voter, je suis impressionnée. Si on avait tous voté, les résultats seraient différents. Une force énorme qui ne s’exprime pas. On est tellement nombreux et on pourrait être tellement fort qu’on pourrait créer notre propre parti - et il aurait toutes ses chances de gagner aux prochaines élections. »
Photos et texte : copyright Doris Kneller

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