Huitième manifestation contre la réforme du système des retraites : toujours des manifestants dans les rues de Montpellier

Soudain, un manifestant aux lunettes noires se jette sur la voiture, la martèle à coups de pied et fait mine de vouloir s'attaquer à son conducteur. Immédiatement, il est entouré par une dizaine de manifestants qui l'éloignent par force. "Tout est de leur faute", crie l'homme aux lunettes noires, parlant des Maghrébins. "C'est à cause d'eux que je dois bosser jusqu'à 70 ans." et : "Arabes dehors !"
Il n'a rien compris", commente un des manifestants dans son entourage. "Non, c'est un agitateur", le corrige un autre, et un troisième avance : "...payé par le gouvernement." Les autres ne disent rien, mais beaucoup ont l'air dégoûtés. Quelques minutes plus tard, l'homme aux lunettes noires quitte le milieu du cortège et, arrivé à la place de la Comédie, il abandonne la manifestation par le Boulevard Victor Hugo...

"Je voulais juste rappeler aux manifestants que personne n'est seul dans la lutte", explique Sylvain, directeur du "Chœur de Lutte", et il ajoute que sa chorale, malgré sa qualité musicale, n'aurait rien de professionnel. "J'ai juste distribué des textes, et ceux qui en avaient envie sont venus chanter."
"Oui, vous avez raison", réagit une dame dans la trentaine à la remarque de l'équipe des Gens de Montpellier, "nous ne sommes peut-être plus que quelque dix mille à manifester. Mais dix mille personnes décidées à ne pas renoncer, ça compte." Et un homme un peu plus âgé ajoute : "Ce n'est pas la quantité qui compte, mais la qualité."

Une question qui surgit souvent dans les rangs des manifestants est celle de l'avenir. "Que le mouvement va-t-il devenir ? ou "Qu'est-ce qu'on va faire ? Continuer à manifester une ou deux fois par semaines ?" ou, tout simplement, "Le mouvement est-il à sa fin ?
Cette question sur l'avenir du mouvement était aussi au cœur d'une réunion de l'AG Interpro qui eut lieu au Peyrou, après la fin de la manifestation. Une première préoccupation était le refus de la mairie - "qui, toutefois, est pour les manifestations", comme dirent les participants à la soirée - de leur accorder une salle. Mais, finalement, tout le monde était positif que, la prochaine fois, ils n'auraient plus besoin de se réunir "dans le froid."

Qui est ce jeune homme, voulait savoir l'équipe des Gens de Montpellier, qui si gentiment achète des légumes, qui les fait cuire dans une grande casserole aux jardins du Peyrou, qui amène des bols et des couverts pour tout le monde... ? "Disons", répond Benoît, "que c'est juste un homme qui a envie que les gens mangent ensemble et en profitent pour discuter des sujets qui, en ce moment, sont importants pour tout le monde."
De toute manière, l'AG Interpro ne s'est pas séparée sans au moins une idée qui vaut la peine d'être soumise à des décideurs nationaux : organiser une manifestation immense à Paris. Une manifestation qui bloquerait la ville entière et qui ferait comprendre au gouvernement qu'il y en a beaucoup en France qui ne sont plus d'accord.
"Si tout le monde va à Paris", doute un des participants à la réunion, "ils vont croire qu'on abandonne le mouvement en province." - "Mais non", interviennent des autres, "on apparaîtra massivement à Paris pour, ensuite, reprendre la lutte dans les petites villes." - "Manifestation à Paris ou non", déclare une étudiante, "nous pouvons pas continuer comme ça. Tout le monde n'a pas le temps de manifester si souvent et, en plus, ceux qui ont le pouvoir ne s'en préoccupent pas. Si on ne fait pas quelque chose de plus massif, de 'visible', on peut aussi bien arrêter le mouvement. Mais ça", ajoute-t-elle, "est hors question."
"Quoi qu'on fasse", commente un homme dans la soixantaine, "le dernier mot n'est pas prononcé. Le peuple est lancé, on va voir ce qu'on va voir."
Photos et texte : copyright Doris Kneller
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