Ces Montpelliérains qui détestent Noël : agressivité et tristesse
Mardi,
le 23 décembre vers 14 heures. La radio joue des airs de Noël, dans les
magasins on pense aux cadeaux et au dîner du réveillon, la mère pense à son
fils, l’enfant à ses parents. Les gens se promènent aux Hivernales, Noël est
proche, plus proche que jamais. Une ambiance de fête s’installe à Montpellier…
Pas
partout. Dans ce tram, par exemple, utilisé par une dame dans la cinquantaine,
Noël est présent, mais il n’a rien de festif. « Je me suis assise à côté d’un
Monsieur assez âgé, je lui donne quelque 70 ans », raconte-t-elle à l’équipe
de Montpellier Presse Online. « Ce que j’ai remarqué tout de suite :
il avait l’air triste. Pas la tristesse de quelqu’un qui vient d’avoir une
mauvaise nouvelle, mais la tristesse profonde de quelqu’un qui ne connaît pas
la joie. »
« Tout
à coup », poursuit-elle, « il tire son téléphone de sa poche et
commence à parler. Je comprends immédiatement qu’il parle à un banquier. »
Il se serait plaint qu’il n’aurait toujours « rien vu venir » d’une
certaine personne qui, évidemment, lui doit de l’argent et aurait demandé si
son débiteur n’avait pas de compte d’épargne. « Il faut faire quelque chose »,
aurait-il dit très sévèrement à la personne à l’autre bout du fil et insisté :
« Aujourd’hui même, j’ai pas envie d’attendre la fin des fêtes. Je veux qu’il
soit saisi, faites le nécessaire, maintenant », aurait-il continué.
La
dame raconte que, entendant ces mots, elle aurait regardé de près ce Monsieur -
et découvert « tous les signes extérieurs de la richesse : des
chaussures très chères, un blouson de chez Aigle… Pauvre riche. Il était
surement seul pour Noël. Il avait peur de vivre un Noël solitaire, triste. C’est
pourquoi il voulait gâcher le Noël d’une autre personne, probablement pauvre, mais
probablement plus heureuse que lui. »
Rencontre
de tram, interprétation, certes, d’une courte conversation au téléphone d’un
voisin aperçu pour la première fois. La dame ne connaît pas le Monsieur, elle
ne sait pas, pour quel service et depuis combien de temps l’autre personne lui
doit de l’argent - et pour quelle raison il a l’air triste et agressif. Mais
une chose paraît sûre : il donne à sa voisine du tram l’impression d’agressivité.
Est-ce en relation avec Noël ?
Beaucoup
plus tard dans un bar à Montpellier. Le propriétaire de l’établissement jette
dehors un client qui, bien qu’il ne soit pas ivre, insulte les autres clients.
Il menace le propriétaire, deux autres clients s’en mêlent pour s’opposer à l’homme
en colère. Personne ne sait vraiment ce qui le tracasse et pourquoi il se comporte
si agressivement. « C’est Noël », réagit un des
clients, « les gens se sentent frustrés et deviennent agressifs. » - « Noël,
ce n’est pas la joie pour tout le monde », enchaîne un autre.
Jusqu’à
maintenant, personne n’a établi des statistiques sur l’agressivité à Noël. Mais
les églises, les services téléphoniques d’aide et les organismes qui s’engage
pour la sécurité des enfants rapportent que, pendant les jours de fête, ils
auraient deux fois plus d’appels au secours que normalement. Les pompiers
parlent d’une hausse impressionnante d’incendies, de cambriolages et de
violence domestique.
Est-ce
vraiment Noël qui rend les gens agressifs ? - Montpellier Presse Online
voulait connaître l’avis des autres Montpelliérains.
« Les
gens boivent trop à Noël », se plaint une étudiante qui raconte qu’elle
passera la fête dans sa famille, mais qu’elle pense que « ça sera comme
tous les ans. Mon frère et mon père boiront trop et ils commenceront à se quereller.
Ma mère
pleurera et moi j’aurai envie de partir. »
« A
Noël, les gens commencent à faire le bilan de l’année passée », commente
un Monsieur dans la cinquantaine. « Et ils se rendent compte que l’année n’aura
pas porté ce qu’ils ont espéré. Ils sont déçus, ils se fâchent contre le monde
et eux-mêmes, et le résultat est une agressivité incontrôlée. »
«
Ce sont les enfants qui souffrent le plus de l’agressivité des adultes. On
parle des yeux émerveillés des enfants - ça existe, j’en suis sûre »,
confirme une dame dans la même tranche d’âge, « mais pas partout. Au
contraire, je pense que beaucoup de familles ne sont pas contentes pendant les
fêtes, pour plusieurs raisons. Et les yeux émerveillés des enfants »,
ajoute-t-elle une note poétique, « se remplissent de larmes. »
« Je
sais déjà maintenant que j’aurai une soirée mauvaise », explique un jeune
homme. « Je suis obligé de la passer avec mes parents. Et patati et
patata, comme toujours : pourquoi tu ne fais pas ceci, ta coiffure, tes
vêtements, tes amis, rien ne leur plaît. Ils veulent un fils qui leur
ressemble, qui vit une vie qu’ils ont rêvée, mais ratée. S’ils pouvaient me
lâcher la grappe, un peu, au moins les jours de Noël. »
« Je
serai avec ma belle-famille », confie une dame dans la trentaine. « Elle
m’aime pas et je l’aime pas non plus. On le sait. Je mangerai, je boirai, à un
moment donné je serai éméchée et les autres pourront dire ce qu’ils veulent…“
Tout
cela sonne triste, trop triste. Y en aura-t-il qui seront contents le soir de
Noël ? « Je passerai la soirée seule avec mon petit-fils. » La
dame dans la soixantaine sourit. « On jouera, on fera des dessins et on
passera une excellente soirée. »
Photos et texte : copyright Doris Kneller
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