Qui fume à Montpellier et comment réagissent les Montpelliérains non-fumeurs ?
L’équipe
de Montpellier Presse Online l’a testé - si on allume une cigarette
dans la rue de Verdun et la promène jusqu’à la Comédie, il y a en moyenne trois
personnes qui demandent s’ils peuvent en avoir une. Celui qui fume entre le
Rondelet et l’Observatoire entend en moyenne une fois : « Avez-vous
une cigarette pour moi ? » Entre la gare et la Comédie, la question
peut être posée jusqu’à huit fois, et si on pose un paquet de cigarette sur une
table de terrasse sur la Comédie, elle se répète en moyenne six fois par heure…
Autrement
dit, celui qui veut fumer tranquillement au centre de Montpellier a intérêt à
le faire à un endroit très discret. - Mais qui sont ces gens qui ne peuvent pas
voir fumer quelqu’un sans lui demander de partager ?
« Avant
ce n’était que des jeunes », constate une dame dans la quarantaine qui a
fait la même expérience que les fumeurs dans l’équipe de Montpellier Presse
Online. « Mais ç’a changé. Maintenant, des gens de tout âge vous demandent des cigarettes. »
Un
Monsieur d’à peu près le même âge, fumeur lui aussi, a fait une observation
supplémentaire. « Il y a deux ou trois ans, les tapeurs se tenaient à des
gens avec un look plutôt cool, aux hommes aux cheveux longs ou en jeans, et ils
préféraient les hommes aux femmes. Entre-temps, ils tapent tout le monde. »
Une
dame d’une trentaine d’années, après avoir demandé une cigarette, argumente :
« Je fume, mais je ne peux pas m’acheter des cigarettes. Elles sont
devenues trop chères. » Et à la question, combien de cigarettes elle
arrive à recevoir gratuitement par jour, elle répond : « Ça dépend,
entre trois et cinq. Les gens sont devenus radins, ils ne donnent plus rien. »
La
dame en question n’a ni l’air d’une SDF ni d’une personne négligée. Elle est
correctement vêtue, sa coiffure témoigne d’un passage chez un coiffeur d’il n’y
a pas plus de trois ou quatre mois. « Si je me considère comme
spécialement pauvre ? », répète-t-elle la question de Montpellier
Presse Online. « Non. Je ne suis pas riche, mais il y a des plus pauvres
que moi. Seulement, mon budget n’est pas suffisant pour payer des cigarettes. »
Une
dame dans la cinquantaine qui se désigne comme non-fumeuse critique le
tabagisme en général et, surtout, celui des jeunes. « Depuis qu’ils ne peuvent
plus fumer à l’intérieur, on les voit partout dans la rue. Ils tiennent leurs
cigarettes dans les mains, et il faut faire attention à ne pas se brûler en
passant. Hommes, femmes, tout le monde fume dans la rue et aux stations du
tram. Mais le pire, c’est les jeunes. Je vois des petits de 14 ou 15 ans qui
grandissent encore. On dit qu’il ne faut surtout pas fumer à l’âge
de croissance. »
La
dame n’a pas tort : si le tabagisme en général diminue en France depuis
quelques années, celui des jeunes est à la hausse. Si on constate que 34 pour
cent de la population entre 15 et 75 fument plus ou moins régulièrement, il y a
44 pour cent des jeunes qui sont adeptes du tabagisme. Et les statistiques sont
dures : elles prévoient que la moitié des jeunes qui commencent très tôt à
consumer les cigarettes ne s’arrêteront plus - et que la moitié parmi ceux qui
ne s’arrêteront plus mourront de la fumée…
En
plus, le Languedoc-Roussillon est plus concerné que les autres régions de France :
tandis qu’en Île-de-France, il n’y a que 35 pour cent de fumeurs et 39 pour
cent en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon tient la première
place avec 41 pour cent.
Une
autre dame d’à peu près le même âge que la précédente raconte que, il y a
quelques jours, elle auraient vu une famille romane faisant la manche devant
un bureau de tabac. « Un homme, une femme et un garçon de once ou douze
ans. Juste au moment où je suis passée, j’ai entendu le petit demander à ses
parents l’argent pour aller acheter des cigarettes. »
Question
morale, bien sûr, mais la loi y a aussi quelques chose à dire. Depuis 2004, les
bureaux de tabac en France n’ont plus le droit de vendre des cigarettes aux
mineurs en dessous de 16 ans. Toutefois, une étude menée par le Comité National
Contre le Tabagisme (CNCT) montre que la loi est plutôt mal appliquée : elle explique
que 74 pour cent des vendeurs de tabac n’hésiteraient pas à enfreindre
cette loi et, toujours selon l’étude, 61 pour cent des enfants de 12 ans
auraient dit qu’on leur vendrait des cigarettes « sans problème ».
Reste la question, pourquoi on fume plus en Languedoc-Roussillon qu’ailleurs.
La plupart des gens interrogés haussent les épaules. Mais une dame dans la
quarantaine a la réponse : « Ici, les terrasses des cafés peuvent
être fréquentées toute l’année. Parce qu’il ne fait jamais vraiment froid. Les
gens peuvent alors fumer. A Paris, il faut trop froid pour fumer dehors. A l’intérieur,
on n’a pas le droit. C’est pourquoi les Parisiens fument moins que les
Montpelliérains. »
Photos et texte : copyright Doris Kneller
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire