mercredi 3 mars 2010

Montpellier et Joseph Delteil : un écrivain devenu Montpelliérain

Joseph Delteil et ses amis à Grabels et Montpellier : Charles Trenet, Georges Brassens, Pierre Soulages...

Culture à Montpellier : Corum
Les "hauts lieux" de la culture à Montpellier

Ce n'est pas à Montpellier, mais à Vieussan que, récemment, des amateurs de la littérature créèrent une association à l'honneur de Joseph Delteil, "Les amis de Joseph Delteil". Il est vrai que l'écrivain n'est pas né à Montpellier - la nomination "fils de Montpellier" ne serait donc pas adéquate - et il n'y passe pas non plus la première partie de sa vie. Mais à 43 ans, il découvre la ville près de la Méditerranée, il tombe malade, et il décide d'y rester jusqu'à la fin de ses jours. En ce moment, cette fin est assez loin - Joseph Delteil aura encore 41 ans devant lui qu'il passerait effectivement à Montpellier et dans ses environs.

Suscitons l'image des rues calmes de Grabels peuplées des gens d'un "calibre" du peintre Pierre Soulages, du comédien Jean-Claude Drouot, des chanteurs comme Charles Trenet et Georges Brassens ou même de l'écrivain américain Henry Miller. Aujourd'hui, nous avons du mal d'imaginer tous ces gens connus réunis à un seul endroit. Toutefois, après 1937, l'année où Joseph Delteil achète sa fameuse propriété, "Tuilerie de Massane" à Grabels, à côté de Montpellier - qui, plus tard, devrait devenir une référence pour les amateurs de la littérature - les "grands noms" commencent à flâner dans les rues de Grabels. Lorsque, aujourd'hui, nous visitons les salles consacrées à Pierre Soulages au musée Fabre ou lorsque nous écoutons les chansons de Charles Trenet et de Georges Brassens, pouvons-nous imaginer que, il n'y a pas si longtemps, ils se seraient promenés à Grabels, absorbés dans leurs discussions avec un écrivain devenu Montpelliérain, nommé Joseph Delteil ?

L'Antigone à Montpellier
Pour ceux qui connaissent un peu ce Joseph Delteil qui fit de Montpellier sa nouvelle patrie - une patrie choisie, non imposée par le hasard de la naissance -, ce nombre étonnant d'artistes qui se rassemblent autour de lui n'est pas étonnant. L'adjectif qui est le plus souvent attribué à son personnage et à son œuvre est "anticonformiste". On peut dire que, au début du 20e siècle, il n'y avait pratiquement pas de mouvement original et individualiste dans le monde de la littérature française où Joseph Delteil n'aurait pas un peu participé.

Pas étonnant, alors, qu'il forma la fameuse phrase : "L'art c'est moi !" Déjà dans les années qu'il passe à Paris - avant de devenir Montpelliérain - il fréquente des gens comme Max Jacob et les surréalistes, il se lie en amitié avec André Breton et Louis Aragon.

Lorsque, pourtant, on regarde ses débuts, on n'a pas l'impression qu'il serait jamais un écrivain capable de heurter le monde bourgeois ou politique : il commence tout simplement par des recueils de poésie. Le premier, intitulé "Le Cœur grec", reçoit immédiatement un prix décerné par l'Académie française, le prix Archon d'Espérouze. Mais déjà un an plus tard, en 1921, il décide que les poèmes ne lui suffisent plus, et il devient le Joseph Delteil que nous connaissons aujourd'hui : l'auteur de nouvelles critiques et de chroniques peu conforme avec le pouvoir politique.

Salle Rabelais à MontpellierBientôt, l'idée des surréalistes prit entièrement racine dans l'œuvre de Joseph Delteil. Il rencontre Marc Chagall et, avec ses amis, il signe le "manifeste du surréalisme" et se réclame d'un "surréalisme absolu".

Toutefois, le trait le plus caractéristique de Joseph Delteil était toujours son individualisme. Il ne nia jamais ses racines occitanes et paysannes qui influencèrent son oeuvre et ses actes pendant toute sa vie. Lorsqu'il avait une opinion, il ne bougeait pas de sa position. Ses idées convenaient ou non à ses amis : s'ils avaient les mêmes objectifs, il était avec eux. Sinon...

En 1925, son ami André Breton est si fâché contre lui qu'il l'exclue du groupe des artistes surréalistes. C'est son livre sur Jeanne d'Arc qui, de nouveau, témoigne de son individualisme plus que de l'envie de suivre fidèlement les idéaux de ses amis. Mais ce roman a beau évoquer la colère des surréalistes, le public l'accueille avec enthousiasme. "Jeanne d'Arc" devient un succès énorme et, le pire aux yeux du groupe de ses collègues artistes, il reçoit même le prix Femina Vie heureuse. Il perd ses amis, mais il gagne des admirateurs du genre de Maurice Denis, l'empereur Hiroshito de Japon ou Paul Claudel qui qualifie le talent de Joseph Delteil comme "tout à fait étonnant..."

Pendant cette époque, Joseph Delteil fréquente le plus en plus le Sud de la France où il rencontre des gens comme Jean Girou ou le sculpteur Aristide Maillol. Et lorsque, finalement, il tombe malade, il décide de s'installer définitivement dans les environs de Montpellier. Une fois guéri, il reprend ses projets de plus en plus individualistes, marqués par son esprit indépendant et, en même temps, paysan.

Photos et texte : copyright Doris Kneller

1 commentaire:

  1. Je viens de lire sa correspondance avec Henry Miller et je vais emprunter son Jésus II à la médiathèque. Il n'a pas la place qu'il mérite...

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