Les Montpelliérains et les Régionales : Micro-trottoir
"Si la politique m'intéresse ? - Non, franchement, pas outre mesure", répond la jeune femme qui, avec son amie, prend un café sur la place Jean Jaurès. Elle sourit. "Je ne vote pas. Je trouve que tous les candidats sont pareils."
"Il n'y a plus de partis à droite ou à gauche", enchaîne son amie qui se dit "un peu plus politisée que ma copine." De toute manière, elle compte voter. "Mais Marine", elle pointe sur son amie, "a raison. Si je vote ou pas, ça ne change rien à la politique. Ceux qui ont le pouvoir font ce qu'ils veulent."
"Je vote pour Frêche", déclare spontanément un Monsieur dans la cinquantaine qui traverse la place Jean Jaurès. "Il n'est peut-être pas mieux que les autres", ajoute-t-il, "mais il exprime ce que nous pensons tous."
"Frêche", proclame aussi une dame un peu plus jeune. "Pourquoi ? Je ne sais pas. On dit qu'il a fait beaucoup de choses pour Montpellier, n'est-ce pas ?"
Un homme dans la trentaine n'est pas d'accord. "L'époque Frêche est terminée. Il est vrai qu'il a fait beaucoup pour Montpellier, mais maintenant, il faut de nouvelles idées. J'aurais peut-être voté pour Jean-Louis Roumégas, mais finalement, je préfère Hélène Mandroux."
"Hélène Mandroux ?" demande un étudiant. "Non, franchement, politiquement parlant, elle est morte. Dommage, je l'ai prise pour un bon maire." Le jeune homme ne veut pas dire pour qui il votera. "Pas pour Mandroux, de toute manière, et pas pour Frêche. Et pas pour Couderc non plus. Mais je vais voter, c'est sûr. Voter est le dernier geste de pouvoir du peuple."
"Voter ? À quoi bon ?" Le jeune homme est assis au pied de la statue de la licorne de la place de la Canourgue. "La politique, ça m'est égal. Qu'ils fassent ce qu'ils veulent, et plus ils se déchirent, mieux ça vaut. La politique, c'est du fric et du pouvoir. Ça ne regarde qu'eux, on n'en a rien à faire." "Eux", pour lui, ce sont les politiciens de toute couleur. Connaît-il les candidats ? "Évidement, on ne parle plus d'autre chose. Georges Frêche qui croit qu'il peut impressionner les gens avec ses propos - et le plus ridicule : il y arrive… et Hélène Mandroux, la bonne maman à tous. Et Jean-Louis Roumégas qui se croit déjà président de la région. Et Raymond Couderc… non, y en a marre. Laissez-moi tranquille avec la politique." Et il se lève et quitte la place de la Canourgue en direction de la Cathédrale Saint-Pierre.
"Je vote pour George Frêche", déclare un homme d'une quarantaine d'années. "Ils peuvent dire ce qu'ils veulent, mais c'est le seul qui sait ce qui est bien pour Montpellier. Et les Parisiens… qu'ils restent chez eux et nous laissent tranquilles. Comment peuvent-ils oser nous dire ce qu'on a à faire, chez nous, à Montpellier ?"
La dame sourit. Elle a environ soixante ans et, en ce moment, elle se repose sur un des bancs de la place de la Canourgue. "Ce que je sais des candidats aux régionales ? Pas grand-chose. Raymond Couderc est professeur, oui. N'est-il pas Algérien, ou sa femme ? Je ne me rappelle pas bien." - La dame se trompe : Raymond Couderc, candidat de la majorité présidentielle, est né à Bordeaux. Mais, au début de sa carrière, il a travaillé avec le ministère d'agriculture en Algérie et enseigné à l'université d'Alger. - "J'aime bien Hélène Mandroux, elle est sympa. Et Roumégas… comment était son prénom ? - Ah oui, Jean-Louis. Il est mignon, ce jeune."
Un étudiant qui se promène sur la place de la Canourgue a capté les derniers mots de la dame. "Jean-Louis Roumégas ?", se mêle-t-il de la conversation. "Oui, faut voter pour lui. L'écologie est notre avenir. À quoi ça vous sert, toute cette richesse, si on fait tout pour foutre en l'air notre planète ? Et encore, j'espère que Roumégas sera à la hauteur. Dommage que nous n'avons pas un Cohn Bendit chez nous ou José Bové. Lui, au moins, il est actif, il agit au lieu de parler."
"Couderc, Frêche, Mandroux, Jeanjean, Roumégas, Revol et j'en passe…" énumère une dame dans la trentaine. "Pouvez-vous me dire la différence ? Je vais vous dire quelque chose, à vous, la presse. La politique, ça n'existe pas. C'est juste un petit jeu entre des gens qui n'ont rien à faire. Et qui ont assez de fric pour se le payer."
Et un homme dans la soixantaine : "Politique, politique, vous ne pensez qu'à ça. Regardez comment on est bien ici, le soleil, la mer, la vie est belle. Je ne vote pas. Je vote pour le soleil et le ciel bleu."
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Photos et texte : copyright Doris Kneller
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